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Lutte contre la drogue: pas de traitement pour les toxicomanes enceintes

4 juillet 2016, 20:00

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Lutte contre la drogue: pas de traitement pour les toxicomanes enceintes

 

«Tous les mois, nous renvoyons au moins une femme toxicomane enceinte.» Le centre Chrysalide n’a pas le choix, explique la directrice Marlène Ladine. Car la méthadone, l’unique médicament de sevrage qui convient aux toxicomanes enceintes, n’est plus disponible. «Cela fait entre 12 et 15 femmes enceintes qui, annuellement, passent chez Chrysalide et à qui nous n’avons rien à offrir.»

Bien que les nouvelles inductions de méthadone aient été stoppées en janvier, le ministère de la Santé continuait à en donner aux usagères de drogue enceintes. Or, depuis quelque temps, cette distribution a été arrêtée. «Les femmes enceintes ne peuvent suivre une désintoxication à la codéine car ce produit n’est pas bon pour elles et le bébé. L’unique médicament de sevrage qui leur convenait était de la méthadone mais elles n’y ont plus droit», indique Marlène Ladine.

Qu’en est-il de la naltrexone et du suboxone ? Marlène Ladine souligne qu’un premier groupe de sept femmes, référées par Chrysalide, a tenté l’expérience en avril, à l’hôpital de Mahébourg. «L’essai n’a pas fonctionné et elles ont arrêté le programme à mi-chemin.»

«De nos jours, il y a une variété de produits pour tous les goûts et toutes les bourses et c’est là le grand danger.» 

Depuis 2014, la directrice de Chrysalide dit noter un rajeunissement des femmes venant chercher de l’aide. «Nous avons commencé à accueillir des jeunes filles de 15-16 ans qui sont, non seulement toxicomanes, mais aussi travailleuses du sexe.» Autre remarque: toutes les femmes frappant à la porte du centre ont goûté à toutes les drogues disponibles, y compris au synthétique. «Les jeunes ne restent pas sur une drogue. Ils passent à autre chose. Aujourd’hui, l’héroïne n’est plus le seul produit consommé par un usager. Celui qui n’a pas d’argent pour l’héroïne va prendre de la méthadone, vendue au marché noir. Si l’usager n’a que Rs 100, ce sera du synthétique, qui est nettement moins cher. De nos jours, il y a une variété de produits pour tous les goûts et toutes les bourses et c’est là le grand danger.»

Face au nombre grandissant de jeunes qui succombent à la variété de drogues de plus en plus difficiles à traiter car leurs propriétés sont inconnues, Marlène Ladine estime qu’il est nécessaire de constituer une plateforme commune de lutte. «Le ministère de la Santé, les médecins, psychologues, psychiatres, travailleurs sociaux doivent se réunir pour agir de façon coordonnée. Par rapport aux drogues, en l’absence d’un Drug Control Master Plan,  n’y a pas de politique claire du ministère de la Santé. Il y a des mesures qui sont prises mais nous ne savons pas où le ministère veut en venir et où il veut aller.»

Enfants en danger

Selon Marlène Ladine, les enfants de parents toxicomanes sont les plus à plaindre. Ces derniers sont tellement obsédés par leur «dope» qu’ils ne communiquent pas avec leur enfant. Celui-ci grandit mais ne sait pas parler, même lorsqu’il est en âge de le faire. «Nous avons eu deux enfants, un d’un an et demi et l’autre de deux ans, qui ne savaient que dire ‘Heu’ pour toute communication

Elle révèle qu’un autre enfant de trois ans n’arrivait pas à mâcher car sa mère ne lui avait donné que du lait depuis sa naissance. «Nous avons dû lui donner tout en purée avant qu’il puisse apprendre à mâcher et se nourrir convenablement.» À Chrysalide, dit-elle, on estime que les enfants ont droit à l’amour, à la communication, à la protection et à la sécurité. Or, fait ressortir Marlène Ladine, «dans une maison d’usagers de drogue, les enfants sont en grand danger de tout. Cette année, ce sera notre plaidoyer».