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Premier interrogatoire en France pour Salah Abdeslam, homme-clé des attentats de Paris

20 mai 2016, 08:25

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Premier interrogatoire en France pour Salah Abdeslam, homme-clé des attentats de Paris

 

Six mois après les attentats de Paris, Salah Abdeslam peut-il dissiper des zones d’ombre? Le seul membre encore en vie des commandos jihadistes du 13 novembre doit être entendu vendredi par les juges d’instruction à Paris, un premier interrogatoire très attendu pour la suite de l’enquête.

Le petit caïd radicalisé devenu le fugitif le plus recherché d’Europe jusqu’à son arrestation le 18 mars à Bruxelles doit être extrait de sa cellule de Fleury-Mérogis (Essonne) où il est incarcéré à l’isolement pour être conduit dans le bureau des magistrats antiterroristes, sous surveillance maximale.

La date de son audition avait été annoncée devant les caméras par l’un de ses avocats, Frank Berton, à l’issue de sa mise en examen le 27 avril à Paris, notamment pour assassinats terroristes.

L’avocat a fait savoir depuis qu’il ne s’exprimerait pas, «ni avant ni après l’interrogatoire», premier d’une série, prévu sur une journée au palais de justice.

Arrêté à Molenbeek, son quartier, après plus de quatre mois de cavale, Salah Abdeslam est le seul protagoniste direct des attentats entre les mains de la justice française.

Au coeur de la cellule, au soir des tueries et bien avant, il apparaît comme un acteur central de l’expédition meurtrière du 13 novembre qui a fait 130 morts et des centaines de blessés.

Abdeslam est celui qui a déposé les trois kamikazes du Stade de France avant d’être exfiltré vers la Belgique. Avant les attentats, c’est lui qui a loué des véhicules et des planques en région parisienne. Dans les mois qui précèdent, il a multiplié les voyages pour convoyer des membres du réseau à travers l’Europe, notamment Najim Laachraoui, possible artificier du 13 novembre mort en kamikaze lors des attentats du 22 mars à Bruxelles.

Ami d’Abdelhamid Abaaoud, organisateur présumé des attaques et tueur des terrasses, il a probablement partagé de nombreux secrets avec lui.

- Va-t-il «s’expliquer»? -

De par son rôle, Abdeslam, qui a «envie de s’expliquer» d’après Me Berton, peut donc en théorie livrer des informations cruciales sur la conception du projet jihadiste, ses commanditaires et d’éventuels complices encore dans la nature. Il peut aussi aider à démêler les liens entre les attentats de Paris et de Bruxelles, fomentés par la même cellule du groupe Etat islamique (EI).

Mais jusqu’à quel point? Les déclarations de Sven Mary, l’avocat d’Abdeslam en Belgique, le décrivant comme un «petit con» à «l’intelligence d’un cendrier vide», «plutôt un suiveur qu’un meneur», laissent présager qu’il cherchera peut-être à minimiser son rôle, comme il semble l’avoir fait devant les enquêteurs belges, en assurant avoir fait «machine arrière» alors qu’il aurait dû mourir en kamikaze au Stade de France.

Abdeslam avait alors entretenu le flou en se présentant comme un pion aux ordres de son frère Brahim et d’Abaaoud, tous les deux morts. Désignant ce dernier comme le «responsable» des tueries, il avait affirmé ne l’avoir vu qu’une fois alors qu’ils ont été compagnons de délinquance à Molenbeek.

«Il ne faut surtout pas être suspendu à ses lèvres» et attendre des «révélations sensationnelles», prévient Gérard Chemla, avocat de victimes des attentats, d’autant que «les investigations sont allées déjà très loin».

Dans cette enquête tentaculaire, plus d’une vingtaine de personnes ont été mises en examen ou inculpées, principalement en Belgique. La justice française a d’ailleurs demandé la remise de quatre autres suspects inculpés à Bruxelles, dont trois soupçonnés d’avoir aidé Abdeslam dans sa fuite.

Le parquet fédéral belge a indiqué dans la nuit de jeudi à vendredi que deux reconstitutions avaient été effectuées dans le cadre de l’enquête sur les attentats du 22 mars à Bruxelles, en présence du suspect clé Mohamed Abrini.

Malgré ces avancées, les zones d’ombres persistent. Coordination, choix des cibles, failles du renseignement: les centaines de parties civiles attendent des réponses des magistrats qui les réuniront pour la première fois du 24 au 26 mai à Paris.