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Del Ghurburrun : «Aujourd’hui, l’État autorise, puis punit»

14 mai 2016, 14:09

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 Del Ghurburrun : «Aujourd’hui, l’État autorise, puis punit»

 

 

De vice-président de la défunte MSPCA à COO chez Air Mauritius en passant par propriétaire d’Animalia, et aujourd’hui «trafiquant de gandia», vous avez un très beau parcours…

Un parcours qui, pour l’instant, a eu un dos-d’âne inattendu. J’espère que tout malentendu sera dissipé, non seulement au niveau de la police et du judiciaire, mais aussi dans la mémoire des gens. On collabore pleinement avec les autorités. On a fourni tous les documents. Nous ferons tout pour redorer notre blason ainsi que celui de Versele-Laga. On a lutté pendant un an pour avoir l’exclusivité de cette marque. L’egg food, no 1 au monde, est vendue dans 66 pays.

Vous avez vous aussi eu des tablettes de chocolat dans la cellule qu’occupait Navin Ramgoolam ?

Je n’ai pas eu de tablettes de chocolat, mais j’ai été agréablement surpris lorsqu’un détenu m’a glissé une boîte de biscuits Oreo pour me réconforter. Il m’a dit : «Ne t’inquiète pas. Tout va bien se passer. Tu es innocent.»

Comment avez-vous meublé vos trois nuits passées au Moka Detention Centre ?

J’ai beaucoup lu. Le premier livre que je leur avais demandé de m’apporter était ma Bible, dont je ne me sépare jamais. Le second, un livre sur le Moyen-Orient. J’ai aussi beaucoup prié et médité au Moka Detention Centre, où j’ai pris connaissance de drames humains qui m’ont totalement bouleversé.

Par exemple, un étudiant bangladais a été incarcéré depuis des semaines car il se trouvait en situation illégale, l’université où il s’était inscrit ayant fermé ses portes. Animalia a décidé de contacter le consulat du Bangladesh à Maurice pour lui offrir son billet de retour, sachant que ses parents ne peuvent le faire.

 

Qui vous en veut au point de vous étiqueter comme un «trafiquant de drogue» ?

Honnêtement, personne. Il y a un gros problème au niveau du système judiciaire à Maurice. Il est mis en marche sans qu’il n’y ait un rapport complet du Forensic Science Laboratory confirmant la présence de graines de cannabis dans la nourriture pour oiseau. Mais j’ai été chanceux d’avoir été libéré sous caution en trois jours.

Vous avez retrouvé la liberté après avoir passé trois nuits en cellule alors que d’autres y ont passé 12 jours ?

12 jours c’est court. Je connais des gens qui sont restés six mois en cellule pour rien. J’ai réalisé à quel point notre liberté est éphémère. Le prix de la liberté et de la présomption d’innocence est inestimable.

Pensez-vous avoir bénéficié d’un traitement de faveur ?

Je pense que Dieu est intervenu en ma faveur. On n’a eu droit à aucun court-circuit. Par le plus grand des miracles, on a eu une place libre à la Bail and Remand Court deux jours après qu’on ait logé la charge provisoire contre moi. J’ai été un miraculé.

Depuis quand êtes-vous dans l’importation de nourriture pour oiseaux ?

Je suis dans l’importation d’aliments pour animaux depuis une dizaine d’années. Le premier container avec de la nourriture pour oiseaux est, lui, arrivé à Maurice en janvier. L’accord a été conclu en 2015.

Êtes-vous le seul importateur de la marque Versele-Laga à Maurice ?

Oui, le seul importateur officiel. De sources sûres, certaines personnes transportent régulièrement ce produit dans leurs valises, sans permis.

Qui vous a recommandé cette marque hollandaise ?

On a une maison sœur à La Réunion qui détient la marque depuis une quinzaine d’années. On n’y a jamais eu de problème.

Saviez-vous que l’«egg food» contient des graines de gandia ?

Il ne contient pas de graines de gandia.

«Le prix de la liberté et de la présomption d'innocence est inestimable.»
 

Une analyse n’est-elle pas nécessaire avant d’importer tout produit ?

Oui. C’est pourquoi ce qui nous arrive est encore plus regrettable… Pour les aliments pour chiens et chats, j’ai eu besoin d’un permis à Maurice et d’un certificat vétérinaire du pays exportateur. Pour la nourriture pour oiseaux, c’est mille fois plus compliqué. J’ai eu besoin de quatre permis. Un du département des plantes du ministère de l’Agro-industrie, un autre du service vétérinaire à Réduit, ainsi qu’un certificat phytosanitaire et un certificat vétérinaire de l’État belge.

Lorsque la cargaison est arrivée à Maurice, j’ai dû faire des démarches pour obtenir un Release Permit du département des plantes et un Landing Permit du service vétérinaire. Aujourd’hui, l’État autorise, puis il punit. Et on s’étonne qu’il n’y ait pas d’esprit d’entrepreneuriat à Maurice.

Lors de votre demande de permis, ne vous a-t-on pas demandé un échantillon pour faire des analyses ?

Ils ont demandé la liste des produits. Ils ont demandé le catalogue, la liste des ingrédients qui vient avec certificat phyto et permis vétérinaire. S’il y avait quelque chose d’illégal, je n’aurais pas eu de Landing Permit et un Clearance Certificate des deux autres autorités.

Vu que le produit que vous importez était incriminé, ne pensez-vous pas que vous auriez dû vous manifester avant qu’on ne vous arrête ?

Si, on s’est manifesté. Le premier jour, on a remis tous les certificats aux autorités pour prouver l’authenticité de nos produits. On veut que la vérité soit rétablie parce que tout a été fait dans la légalité.

Quand l’affaire a éclaté, avez-vous pris contact avec les représentants de la marque en Belgique ?

Oui. Versele-Laga n’acceptera pas qu’on ternisse son image. Les représentants font tout ce qu’il faut au niveau de l’ambassade belge pour rétablir les faits. Ils ont d’ailleurs confirmé que leurs produits sont en vente libre dans trois pays ayant des lois antidrogue strictes – Singapour, Hong-Kong et l’Australie.

Quel est votre sentiment depuis le début de toute cette affaire ?

Je ne m’attendais pas à une arrestation, étant donné que j’avais tous les permis et que le bon sens avait primé sur la procédure. Je suis confiant que la vérité triomphera.

Quelle est la marche à suivre à présent ?

On avait passé une commande pour un second container avec Versele-Laga. On l’a mis en attente. Sinon, je travaille sur le dossier avec mes hommes de loi Mes Lobine et Mansoor.

Où avez-vous eu votre diplôme de chirurgien ?

Je ne suis pas chirurgien. Je suis comportementaliste canin. Je suis psychologue des animaux. J’emploie des vétérinaires. J’en ai trois à ma charge. Je suis directeur d’entreprise.

Combien le «trafic» de chiens vous rapporte-t-il ?

Je n’ai jamais été mêlé à un trafic de chiens. Animalia, qui compte trois cliniques vétérinaires, 10 000 clients et plusieurs marques internationales, ne vend pas de chiens. C’est un service vétérinaire avec un magasin de produits associés. D’ailleurs, la compagnie est en train de faire une base de données des éleveurs «sérieux» à Maurice, car il y a trop d’arnaques. On introduira le système Michelin pour les éleveurs pour ensuite les recommander.