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Visite d'Obama à La Havane : c'est reparti comme en 1928?

19 mars 2016, 11:01

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Visite d'Obama à La Havane : c'est reparti comme en 1928?

La dernière fois qu'un président américain s'est rendu Cuba, en 1928, un accueil triomphal lui fut réservé et sa délégation en avait profité pour s'affranchir de l'austère prohibition.

Près de neuf décennies plus tard, après la guerre froide et son lot d'affrontements ayant relégué la visite de Calvin Coolidge au rang de lointains souvenirs, l'atmosphère de la visite d'Obama semble présenter certaines similitudes.

Obama, comme Coolidge, cherche à marquer d'un coup diplomatique son  dernier mandat. Avec cette visite à La Havane, il veut sortir de l'impasse les deux pays antagonistes depuis l'arrivée au pouvoir de Fidel Castro en 1959.

En arrivant à La Havane, Coolidge, président impassible surnommé «Cal le silencieux», était également en mission d'apaisement, espérant contenir la colère déclenchée par la politique de Washington en Amérique latine.

L'arrivée du cuirassé USS Texas à bord duquel le président avait fait le voyage fut l'occasion d'un attroupement monstre sur le front de mer, témoignent les clichés de l'époque.

«La foule était énorme et très enthousiaste», raconte le journaliste Beverly Smith Jr, qui était du voyage et a relaté ces évènements 30 ans plus tard dans l’hebdomadaire américain Saturday Evening Post. 

Une fois en ville, le président Coolidge avait défilé en décapotable dans les rues de la capitale cubaine, et la foule massée sur son passage «lui envoyait des baisers et lançait des fleurs». En réponse, le placide Coolidge avait même poussé l'euphorie jusqu'à lever son chapeau.

Smith écrivit plus tard que le président avait en revanche été choqué lors de ce défilé à la vue d'«un groupe de jeunes filles très maquillées» accompagnées de leurs «maquerelles» en quête de relations internationales un peu particulières.

Contrairement à Coolidge, M. Obama arrivera par la voie des airs. Et ses déplacements s'effectueront à bord de sa fameuse limousine blindée, surnommée «La bête».

L'accueil promet également d'être enjoué. La vieille Havane a été remodelée et rafraîchie pour l'occasion, et la population se montre en grande partie très enthousiaste à l'idée de voir cette page d'histoire se tourner.

«Cela aurait déjà dû arriver bien avant», confie d'ailleurs à l'AFP Sergio Fundora, un ouvrier d'un chantier de restauration de 52 ans.

Diplomatie et daïquiri

A l'époque de la visite de Coolidge, débarquer sur la grande île des Caraïbes offrait l'opportunité d'oublier la rigidité de la prohibition (1919-1933) quelques jours.

«Une grande partie d'entre nous y est allée franchement», raconte M. Smith. A l'exception de "Cal le silencieux" qui s'en tenait aux boissons sans alcool. 

Aujourd'hui, avec les timides assouplissements de l'embargo consentis par la Maison Blanche et l'essor du tourisme à Cuba, l'île pourrait rapidement retrouver sa réputation de ville festive auprès des Américains.

Au bar El Floridita, un des plus anciens de La Havane, les daïquiris coulent à flot pour une clientèle à majorité étrangère.

Le barman William Arias, 52 ans, explique à l'AFP qu'il est «totalement possible» que la délégation de Coolidge ait fait étape dans l'établissement. «A cette époque, les Américains qui voulaient boire venaient dans ce bar», affirme-t-il.

Obama semble de son côté plutôt enclin à adopter le régime Coolidge à La Havane. Il confiait récemment qu'il profiterait de son séjour «pour savourer une tasse de café cubain», dans une lettre adressée à une Cubaine de 76 ans à l'occasion du rétablissement du service postal direct entre les deux pays. 

En revanche, les délégations américaines et les journalistes pourraient bien saisir l'occasion d'alourdir leurs bagages de rhum cubain, imitant ainsi leurs aînés qui à l'époque avaient bénéficié d'une tolérance exceptionnelle pour ce voyage.

La loi américaine n'autorise encore les voyageurs qu'à rapporter 100 dollars d’alcool ou de tabac cubains aux Etats-Unis. Un peu juste pour une boite de cigares, mais largement suffisant pour s'offrir quelques bouteilles de bon rhum à 7 dollars.

En 1928, M. Smith s'était rendu compte que ses bagages ne pouvaient contenir les six bocaux de 1/2 gallon (1,9 litre) de Bacardi qu'il avait achetés.

Donc «j'ai enlevé la plus grande partie de mes habits», raconte-t-il, alors que «d'autres ont acheté de nouvelles valises pour leur supplément bagage.»