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Or: et si Lutchmeenaraidoo avait tort?

18 mars 2016, 22:00

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Or: et si Lutchmeenaraidoo avait tort?

L’ex-ministre des Finances a-t-il raison de privilégier l’or comme une valeur sûre ? Pas si sûr, au vu de l’évolution du métal jaune depuis quelque temps. Et l’appréciation du dollar américain face à l’euro, ainsi que la baisse des importations de l’Inde et de la Chine, principaux importateurs d’or, ne devraient en rien arranger les choses…

Constat : sous le mandat de Vishnu Lutchmeenaraidoo comme Grand argentier, les réserves en or de la Banque de Maurice ont plus que doublé en un an. Passant de 3,1 tonnes en janvier-juillet 2014 à 7,9 tonnes en janvier 2015 et à 8,8 tonnes en juillet 2015. Qui plus est, en décembre dernier, Vishnu Lutchmeenaraidoo a, à titre personnel, obtenu un prêt de 400 000 euros de la SBM Ltd pour investir dans l’or.

Sauf que, entre-temps, l’or a commencé à perdre son statut de valeur refuge. Et cette tendance à la baisse devrait se maintenir, prévoient des économistes. Notamment parce que l’évolution de l’or n’est plus en corrélation avec celle du dollar américain, souligne l’économiste Swadicq Nuthay. En d’autres mots, avec l’appréciation du dollar américain face à l’euro, le prix de l’or empruntera mécaniquement une courbe descendante.

En clair, face à la reprise économique aux États-Unis, suivie d’une hausse de 25 points de base du taux d’intérêt intervenue en décembre 2015, et la fin de la politique d’assouplissement monétaire décidée par la Federal Reserve Bank, il est fort à parier que le billet vert va prendre davantage l’ascenseur. Ce qui fait dire aux spécialistes qu’il y a très peu de chance que le cours du métal jaune va décoller.

«INVESTISSEMENT PEU LIQUIDE»

À l’instar de Rajiv Servansingh, observateur économique, qui se dit convaincu que le métal jaune ne retrouvera plus son pic du 6 septembre 2011, quand il s’affichait à un cours record de USD 1 921,17. Et ce, même si, déclare-t-il, le cours du métal jaune a gagné 19% depuis le début de l’année, passant à USD 1 268 l’once le jeudi 17 mars.

Dès lors, des questions se posent sur l’insistance de l’ex-Grand argentier à privilégier l’or comme une alternative crédible aux dépôts en devises. Sollicité, l’économiste Éric Ng fait valoir que le métal jaune est un investissement peu liquide. «Quand on investit dans l’or, c’est pour les moyen et long termes, précise le directeur du cabinet Pluriconseil. En même temps, c’est un investissement hautement spéculatif. On fait carrément de la spéculation. Les placements en or sont, en effet, tributaires des fluctuations des devises, principalement celles du dollar et l’euro.»

Doit-on comprendre que l’ex-ministre des Finances voit se profiler à l’horizon une récession à double creux? En effet, ce scénario devrait pousser le cours de l’or vers de nouveaux sommets, avance un professionnel de la finance. Un ancien ministre des Finances, qui a voulu garder l’anonymat, est loin d’être convaincu. «Au plus fort de la récession en 2008 et 2009, l’or ne s’était pas apprécié significativement, sauf en 2011», fait-il ressortir. Et de préciser : «Aujourd’hui, avec des signes de ralentissement économique en Chine et des effets de récession qui se font toujours ressentir, le cours de l’or plafonne autour de USD 1 200 l’once.»

Il faut ajouter à cela le fait que les importations d’or de l’Inde, de loin le plus grand consommateur du métal jaune au monde, ne seront pas aux niveaux d’avant 2014. À moins que les taxes à l’importation soient abaissées. Idem pour le second consommateur d’or au monde, la Chine, dont les importations n’atteindront pas le niveau record de 2013. La raison étant que la chute des cours, l’an passé, a découragé toute nouvelle demande d’investissement en or.