Publicité

Le pape François demande un "examen de conscience" pour les torts infligés aux peuples indigènes

16 février 2016, 08:16

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Le pape François demande un "examen de conscience" pour les torts infligés aux peuples indigènes

 

Le pape François a demandé lundi un "examen de conscience" sur le sort réservé aux peuples indigènes du Chiapas, dans le sud du Mexique, lançant aussi un cri d'alarme sur les menaces pour l'environnement que provoque l'exploitation de leurs ressources naturelles.

Lors d'une messe devant une foule très recueillie de dizaines de milliers de personnes sur un stade de San Cristobal de Las Casas, le pape argentin a appelé à demander "pardon" pour l'exclusion dont ont été victimes les peuples indigènes dans l'Histoire.

Reprenant des accents sociaux qu'il avait eus lors de son voyage en Equateur, Bolivie et Paraguay, en juin, le pape a martelé: "Souvent, de manière systématique et structurelle, vos peuples (indigènes) ont été incompris et exclus de la société. Certains ont jugé inférieures vos valeurs, votre culture et vos traditions."

"D'autres, étourdis par le pouvoir, l'argent et les lois du marché, vous ont dépossédés de vos terres ou les ont polluées", a accusé le pape dans une critique acerbe des grandes sociétés multinationales qui exploitent les ressources de la région.

"C'est si triste ! Que cela nous ferait du bien, à tous, de faire un examen de conscience et d'apprendre à dire pardon", a déclaré le souverain pontife lors de cette messe en plein air, devant de nombreuses personnes venues en tenues traditionnelles, des bébés dans les bras.

Jorge Bergoglio en a profité pour lancer un nouvel appel pour la protection de la nature: "Le défi environnemental que nous vivons et ses racines humaines nous touchent tous et nous interpellent. Nous ne pouvons plus faire la sourde oreille face à l'une des plus grandes crises environnementales de l'Histoire", a souligné le pape, parlant dans un décor de collines sauvages.

- 'Bienvenue au pape de la lutte' -

L'ambiance était surchauffée à l'arrivée du pape en hélicoptère. Un prêtre, au micro, faisait répéter à la foule : "Bienvenue au pape de la paix, de la miséricorde, de la lutte ! Vive le pape de l'Eglise des pauvres, de l'Eglise qui naît du peuple, de l'Eglise qui veut des évêques et des prêtres proches du peuple !"

Dans cette région du Chiapas, l'un des creusets de la théologie de la libération au Mexique, le nom de Samuel Ruiz, l'ancien évêque progressiste de San Cristobal, mort il y a cinq ans, a été évoqué devant le pape. Le souverain pontife s'est recueilli devant la tombe de celui que les indigènes surnomme affectueusement "Tatic", le "père de tous" en langue tzotzil, qui a développé dans son diocèse le rôle des diacres et qui fut un temps perçu avec méfiance par le Vatican.

Pour la première fois, des textes liturgiques ont été prononcés dans les principales langues indigènes, une volonté expresse du pape François qui a remis le premier décret du Vatican, autorisant la liturgie en langue tzeltal, à un groupe d'indigènes à la fin de la messe.

Des Bibles traduites dans ces langues, fruits d'années de travail, ont été remises au pape.

"Seul Dieu sait si les problèmes qu'a notre peuple pourront trouver des solutions", affirmait à l'AFP Maria, une vieille femme d'origine tzeltal, soulignant que "l'eau, l'électricité, l'hôpital, et parfois même la nourriture" manquent.

San Cristobal de Las Casas, à 2.200 mètres d'altitude, porte le nom de "Las Casas", en souvenir de l'évêque dominicain Bartolomé de Las Casas, l'un des premiers défenseurs espagnols des droits des Indiens aux XVe/XVIe siècles, en pleine répression des peuples autochtones par les Conquistadores.

Le pape a déjeuné à l'évêché avec des représentants de familles indigènes, avant de rejoindre dans l'après-midi par hélicoptère la ville de Tuxtla où il a dirigé une messe devant un stade rempli.

Le Chiapas (4,7 millions d'habitants) est l'un des plus pauvres des Etats de la Fédération mexicaine. 30% de la population ne parle pas espagnol et seulement 58% de ses habitants se déclarent catholiques.

Le respect des droits indigènes et le contrôle des ressources naturelles de la région ont été au coeur de la rébellion du mouvement zapatiste (EZLN, Armée zapatiste de libération nationale) qui a beaucoup fait parler de lui dans les années 90.