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Roger Clency: Adieu à un grand homme du séga

16 janvier 2016, 18:00

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Roger Clency: Adieu à un grand homme du séga

Roger Clency, souffrant d’un cancer, nous a quittés mercredi matin à l’âge de 74 ans. Le chanteur a marqué la musique locale d’une empreinte indélébile. C’est en 1958 que Roger Clency décide de se consacrer au séga, musique qui venait alors de faire son entrée dans les salons où elle était froidement accueillie ou sinon carrément rejetée.

C’est son premier duo avec Marie-Josée intitulée «Marlena» qui le place sur le devant de la scène. Ce n’est toutefois qu’avec l’implantation des établissements hôteliers sur nos côtes que le chanteur sera reconnu. Il a ainsi été parmi les premiers artistes à introduire le séga dans les hôtels. C’était dans les années 70.

S’inspirant de Ti Frère, Roger Clency souhaite donner une autre dimension au séga. «Je ne voulais pas que jouer du séga, je voulais faire du spectacle et surtout qu’on nous respecte, nous les ségatiers. Tout ce que je demandais, c’était du respect», disait-il dans une interview accordée à l’express en 2011. 

«Trouver notre identité culturelle» 

 

En 1982, Roger Clency s’envole pour la France. Il regagne le pays trois ans plus tard. Mais les choses avaient changé. Les conditions dans les hôtels n’étaient plus les mêmes. Il repart pour la France où il s’est attelé à faire connaître sa musique. Son souhait a toujours été de continuer à faire du séga. «Notre séga est dansant et il plaît. Il faut garder la basse rythmique et surtout que les jeunes continuent à faire du séga. Le reggae, c’est la musique de la Jamaïque, le zouk celle des Antilles tandis que le séga nous appartient. Je souhaite qu’on trouve enfin notre identité culturelle», expliquait-il lors de son interview. Cet amour de la musique locale, Roger Clency l’a transmis à son fils Jean-Alain, qui lui emboîte aujourd’hui le pas.

Avec l’organisation du concert Nostalgie : les légendes du séga en mai 2009, Roger Clency a retrouvé la scène mauricienne aux côtés de Marie-Josée. Bien que n’étant plus sa compagne dans la vie, cette dernière est toujours restée à ses côtés sur scène. Roger Clency a continué à chanter jusqu’à la dernière heure. Le grand homme est parti mais ses titres Rosa, Ton Polo ou encore Valse Kreol ne finiront jamais de nous faire danser. Sa dépouille devrait arriver au pays lundi.

LES ARTISTES LUI RENDENT HOMMAGE

Marie-Josée Clency : C’est de La Réunion et en route pour l’aéroport que Marie-Josée Clency nous a exprimé ces quelques mots. Celle qui a été la compagne de Roger Clency à la ville comme à la scène était des plus émues. «Le départ de Roger est une grande perte. Il laisse une veuve et une orpheline. Une veuve dans la vie et une orpheline sur scène», a-t-elle déclaré. Marie-Josée Clency a tenu à participer à la soirée hommage dédiée à Roger Clency qui s’est tenue hier soir au Plaza.

Linzy Bacbotte : «C’était quelqu’un qui était très aimé de ses enfants. Il souhaitait que ces derniers poursuivent dans la musique. La dernière fois qu’on s’était vu, c’était au Casino de Paris. On parlait de l’évolution du séga et on partageait nos idées. Son décès est une grande perte pour tous les artistes locaux.»

Mario Armel : «Michel Delpech, David Bowie… Depuis le début de l’année il y a plusieurs départs chez les artistes. À ces grands noms vient s’ajouter celui de Roger Clency. Son départ me touche. Je suis plus jeune que lui mais je l’ai côtoyé pendant pas mal de temps. C’est l’un des pères du séga moderne. Lorsque je l’ai connu, il était policier à l’époque. J’ai vu ses enfants grandir. Il était un artiste de qualité. »

Jean-Claude Gaspard : «Roger Clency est un ami de longue date. Je l’ai connu en 1965. C’était toujours pour moi un plaisir de participer à un spectacle avec lui. Sa musique faisait danser les gens et apportait de la bonne humeur. Il était un vrai showman et ne faisait pas que chanter sur scène mais il savait comment communiquer avec son public. Li met dimounn dan lambyans. Il est un exemple à suivre pour les jeunes artistes. »

Sandra Mayotte : «Son départ nous émeut. On savait qu’il était malade, mais cela s’est passé si vite ! C’est quelqu’un qui inspire le respect de par son talent et sa contribution dans le milieu culturel. Roger et Marie-Josée Clency sont les premiers ségatiers à avoir emmené le séga dans les hôtels dans les années 70. Si aujourd’hui le tourisme est un de nos piliers économiques, ils y ont contribué. Roger Clency s’est bonifié avec les années. Il s’est donné sans compter. Au Festival Kreol 2015, il était malade et souffrait le martyre ; mais avait continué à chanter. Ses ségas transcendent les générations et resteront dans l’histoire de la musique locale».

Gérard Louis : «Son départ m’afflige. Son morceau qui m’a le plus touché est Rosa. À l’époque, j’étais un enfant et quand je chantais ce séga, mes parents me frappaient. Roger Clency avait une imagination débordante. Comment avait-il fait pour composer une chanson qu’on n’avait pas le droit de chanter ? Lorsque j’ai voulu organiser les concerts Nostalgie j’ai donc pensé à lui. Je le dis en toute modestie, mais je crois que si je ne l’avais pas fait, il serait tombé dans l’oubli. Depuis 2008, soit après le concert Nostalgie : Les légendes du séga mauricien, Roger Clency a continué les spectacles, dont le dernier était le Festival Kreol en novembre. Avec ces concerts, j’ai appris à mieux connaître Roger Clency. C’était quelqu’un de direct qui vous disait sans détour ce qu’il pensait de vous. Il ne connaissait pas le mensonge. C’était un bon vivant. Il devait tous les jours avoir sa bière glacée et une fois la semaine, son menu préféré : gros pois et pattes de boeuf. Le duo que Marie Josée et lui  formaient sur scène est unique. C’est un spectacle qu’on ne verra plus.»

Laura Beg : «Roger Clency est un grand homme de la musique locale. Un ambassadeur de notre séga, qu’il a fait connaître dans plusieurs pays. C’est une grande perte pour les artistes. Je l’ai rencontré lors de concerts en France et ce qui m’avait le plus touchée, c’est à quel point lui et Marie-Josée étaient unis sur scène. Aujourd’hui Marie-Josée a perdu sa moitié ».