Publicité

Téhéran et Washington évitent une crise après la libération de marins américains

14 janvier 2016, 08:16

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Téhéran et Washington évitent une crise après la libération de marins américains

 

L'Iran et les Etats-Unis ont cherché à éviter une crise avec la libération rapide mercredi de marins américains détenus par Téhéran, à quelques jours de l'entrée en vigueur attendue de l'accord historique sur le nucléaire.

"Je veux remercier les autorités iraniennes pour leur coopération et leur réponse rapide (...) Nous pouvons tous imaginer comment une situation semblable pourrait avoir évolué il y a 3 ou 4 ans", a dit le secrétaire d'Etat américain John Kerry après la libération de dix marins qui s'étaient égarés dans les eaux iraniennes.

Son homologue iranien Mohammad Javad Zarif s'est félicité du règlement rapide de l'affaire par "le dialogue et le respect", loin de la politique "des menaces".

En principe toujours adversaires depuis la rupture de leurs relations en 1980, l'Iran et les Etats-Unis ont amorcé un rapprochement à la faveur des longues négociations sur le programme nucléaire iranien couronnées en juillet par un accord historique entre Téhéran et les grandes puissances.

Interceptés mardi à bord de deux petits navires rapides de guerre au large de l'île iranienne de Farsi, dans le nord du Golfe, les dix marins, neuf hommes et une femme, ont été libérés après moins de 24 heures de captivité.

"Après avoir présenté des excuses, ils ont été libérés dans les eaux internationales" car "leur entrée dans les eaux territoriales iraniennes n'était pas intentionnelle", ont annoncé les Gardiens de la révolution, l'armée d'élite du régime.

"C'est notre faute, nous nous excusons pour cette erreur", a indiqué sur des images de la télévision d'Etat iranienne un homme présenté comme un des dix marins américains, ajoutant qu'ils avaient été bien traités en détention.

D'autres images de la télévision d'Etat montrent les marins les mains sur la tête ou assis à même le sol sur des tapis en train de manger.

Le département d'Etat américain a affirmé que M. Kerry n'avait pas présenté d'excuses pour l'incident.

- 'Bonne histoire' -

Dès le début de cette affaire, Washington s'était abstenu de jeter de l'huile sur le feu. Et côté iranien, l'amiral Ali Fadavi, commandant des forces navales des Gardiens de la révolution, a rapidement expliqué que l'action des marins n'était pas "hostile" et parlé "d'une panne de leur système de navigation".

Selon un diplomate américain, M. Kerry a eu "au moins cinq fois" M. Zarif au téléphone et s'est efforcé de le convaincre qu'une solution rapide à l'affaire serait une "bonne histoire" pour les deux pays, c'est-à-dire qu'elle offrait l'occasion à l'Iran de "démontrer qu'il était une nation responsable" et qu'il "pouvait coopérer" et ainsi éviter tout "risque d'escalade".

Les Etats-Unis maintiennent une importante présence militaire dans les eaux stratégiques du Golfe. Plusieurs incidents avaient déjà opposé leur marine aux forces navales iraniennes.

La marine américaine privilégie l'hypothèse d'une erreur de navigation pour expliquer l'entrée "non intentionnelle" des bateaux dans les eaux iraniennes.

Pour Téhéran, les nombreux "contacts téléphoniques menés à l'approche de l'entrée en vigueur de l'accord nucléaire ont permis de régler plus rapidement" l'affaire.

Celle-ci est en effet survenue alors que l'Iran achève la mise en application de ses engagements prévus par l'accord nucléaire qui vise à limiter ses activités sensibles en échange d'une levée progressive et contrôlée des sanctions internationales.

- 'Pour très bientôt' -

Après la libération des marins, l'un des principaux négociateurs nucléaires iraniens, Abbas Araghchi, a affirmé que l'entrée en vigueur officielle de l'accord devrait intervenir au plus tard dimanche.

"L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) doit rendre son rapport vendredi" pour confirmer que l'Iran a tenu ses engagements, et "vendredi, samedi ou dimanche nous annoncerons l'application de l'accord", a-t-il dit.

L'AIEA n'a pas confirmé cette annonce. Mais selon un responsable iranien, un "grand nombre" d'inspecteurs de l'AIEA se trouvent en Iran pour vérifier les mesures prises par Téhéran.

Selon M. Araghchi, un "communiqué commun" sera publié par M. Zarif et la chef de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini au nom des puissances du groupe 5+1 (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine, Allemagne) pour officialiser l'application de l'accord.

Ce jour marquera le début d'une période d?au moins dix ans durant laquelle l'Iran limitera son programme nucléaire parallèlement à la levée ou la suspension effective des sanctions internationales.

M. Kerry, principal artisan de cet accord qui doit garantir que l'Iran ne se dote pas de la bombe nucléaire, a confirmé que "le jour de la mise en oeuvre est pour très bientôt", "probablement dans les prochains jours".

Dans le cadre de cet accord, l'Iran a déjà réduit le nombre de ses centrifugeuses et envoyé à l'étranger la quasi totalité de son stock d'uranium faiblement enrichi. Il doit encore enlever prochainement le coeur du réacteur à eau lourde d'Arak.

L'accord a provoqué la colère des alliés traditionnels des Etats-Unis, l'Arabie saoudite et Israël notamment, qui y voient l'amorce d'une réconciliation Washington-Téhéran.

A ce propos, John Kerry doit rencontrer jeudi à Londres son homologue saoudien Adel al-Jubeir.