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Mauriciens de l’année: une voix et des parents en or...

1 janvier 2016, 18:44

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Mauriciens de l’année: une voix et des parents en or...

 

Dans l’île, on a rarement vu une personne porteuse  d’un handicap aussi épanouie. Jane Constance, gagnante du concours The Voice Kids en France, a étonné par sa force de caractère. Sans se décourager, elle va au bout de ses rêves. Surtout aussi grâce à l’encadrement de ses parents, Tony et Françoise. Autant de raisons qui font que l’express leur a décerné le titre de Mauriciens de l’année. Tony Constance raconte leur dur parcours.

Joint par téléphone alors que la famille se trouve en Normandie, en France, Tony accepte de répondre à nos questions. Oui, dit-il, réaliser, à la naissance d’une enfant désirée, qu’elle est différente des autres est une surprise. Une fois l’onde de choc passée, les parents ont deux possibilités: se lamenter et «fer zanfan la asizé pa bouzé de peur qu’il lui arrive malheur» ou se ressaisir, accepter cette réalité et commencer par aménager son intérieur en conséquence.

Dans le cas de Jane, tous les coins de mobilier ont été arrondis, les escaliers et marches minimisés, son armoire rangée de façon à ce qu’elle puisse repérer ses vêtements. Tony et Françoise se sont mis en quête d’informations sur ce qui est faisable pour leur fille à Maurice et sur ce qui est fait ailleurs pour les aveugles et ce, par le biais d’Internet et de livres. «Je dois avouer qu’à un moment, nous manquions d’informations. Il n’existe pas un système de formation des parents pour les aider à faire évoluer leur enfant handicapé.»

Développer ses autres sens

Jane a fréquenté une maternelle à mi-temps, le reste du temps, elle l’a passé avec sa grand-mère car ses parents avaient besoin de travailler. Au fur et à mesure qu’elle grandissait, les Constance ont fait des essais pour voir ce qui pourrait développer ses autres sens. «Comme tous les parents, on tapait un peu de ravane, on chantait et elle aimait ça.» C’est ainsi qu’à cinq ans, ils lui font prendre des cours de chant et deux ans plus tard des cours de piano. «Elle montrait un plaisir évident envers la musique et le chant. Donc, nous l’avons orientée.» Jane prend part aux examens de la Royal School of Music et réussit le grade IV en chant et piano.

En termes d’écoles primaires spécialisées, les Constance ont opté pour Lizié Dan Lamin où «beaucoup de bonnes choses sont faites mais où il y a aussi des améliorations à apporter. Il faut un système d’éducation adapté et des instituteurs formés qui ne sont pas transférés au bout d’un an».

Pour pallier les lacunes notées, Tony et Françoise se mettent à la page de la technologie. Et, bien que les équipements coûtent cher, ils font des sacrifices pour offrir à Jane un ordinateur spécialement conçu pour les aveugles afin qu’elle puisse apprendre ses leçons, mais aussi aller en ligne, envoyer des e-mails et faire des recherches. «Il faut évoluer avec la technologie. C’est maintenant que Maurice découvre ces petits appareils. Nous avons au moins dix ans de retard à rattraper en la matière.»

Élargir ses horizons

Tony poursuit les recherches pour voir ce qui se fait de mieux et qu’il pourrait mettre à la portée de Jane pour qu’elle puisse évoluer. «Nous essayons de lui donner la chance de faire un maximum d’activités.» Ainsi, Jane pratique la natation, fait du roller sous surveillance, a récemment  fait du patin à glace et fera bientôt du tandem avec son père. «Nous lui ouvrons le plus de portes possible car le but est qu’elle soit autant que possible autonome.»

Leur priorité reste son éducation. Jane va d’ailleurs entamer sa Form V en janvier. Vu qu’elle est bonne élève, ils lui ont suggéré comme choix de carrière la psychologie «car elle pose beaucoup de questions» ou le droit. «En lui expliquant le droit, nous avons pris le symbole de la justice qui est la femme aveugle aux yeux bandés tenant une balance à la main. Elle a aimé le symbole et a opté pour le droit. Cela ne l’empêchera pas de chanter. Mais si un jour, elle décide d’arrêter le chant, ce sera une fois de plus, son choix.»

À chaque entretien de presse, Tony Constance parle de protéger sa fille. Contre qui ou quoi? «La meilleure protection que nous pouvons lui offrir, c’est l’éducation. Mais depuis qu’elle a gagné The Voice Kids, elle est extrêmement sollicitée de partout, en France, au Canada, en Australie et ailleurs. En tant que parents, nous ne devons pas la surmener. Nous devons aussi mettre des barrières quand il le faut. La priorité demeure ses études.»

Autant ils sont heureux de toutes ces opportunités magnifiques qui se présentent à Jane, autant ils trouvent dommage que l’État n’offre pas de facilités technologiques aux enfants porteurs d’un handicap, que la législation sur l’employabilité des handicapés ne soit pas respectée et que les transports publics et les bâtiments ne soient pas adaptés à ces personnes. «Tout est entre les mains de nos décideurs. Il faut de la volonté politique pour faire bouger les choses. Entre la bonne volonté et son application, il y a un fossé. L’État doit donner à tout enfant handicapé la possibilité d’évoluer comme Jane l’a fait…»