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Madagascar: la justice rejette la destitution du président par l'Assemblée

13 juin 2015, 14:53

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Madagascar: la justice rejette la destitution du président par l'Assemblée
La justice malgache a rejeté samedi la demande de destitution du président Hery Rajaonarimampianina votée par l'Assemblée nationale, nouveau chapitre dans la crise politique qui menace de déstabiliser ce pays pauvre, 18 mois seulement après le retour à l'ordre institutionnel.
 
"La présente mise en accusation (du chef de l'Etat) ne repose sur aucun fondement juridique", indique la Haute cour constitutionnelle dans son jugement mis en ligne samedi matin: "La demande est rejetée comme non fondée".
 
"La décision de la Haute cour constitutionnelle est ridicule", a déclaré dans une toute première réaction à chaud Pierre Houlder, le porte-parole du MAPAR, le parti de l'ex-homme fort du pays Andry Rajoelina, majoritaire à l'Assemblée, qui avait voté la destitution le 26 mai.
 
"C'est l'Etat de droit, tout le monde doit se soumettre à la décision de la Haute cour constitutionnelle" a répliqué le président du parti de Hery Rajaonarimampianina (HVM), Rivo Rakotovao.
 
Selon ce dernier, "la suite des événements dépend maintenant du comportement des députés. La dissolution de l'Assemblée nationale n'est pas une obligation mais si les députés persistent à faire barrage au développement, alors il appartient au président de la République de prendre la décision finale".
 
Réponse d'Augustin Andriamananoro, vice-président du MAPAR: "La solution du problème de Madagascar maintenant est de demander l'avis du peuple par une élection présidentielle anticipée".
 
En fait, le chef de l'Etat affronte deux adversaires politiques en même temps, ses deux prédécesseurs, qui n'ont pas digéré d'avoir été exclus de la dernière élection présidentielle de 2013, sous la pression de la communauté internationale.
 
Le Premier est Marc Ravalomanana, démocratiquement élu puis renversé en 2009 par un coup d'Etat du second, Andry Rajoelina, resté au pouvoir jusqu'en 2013 sans jamais avoir été élu.
 
Marc Ravalomanana vient tout juste d'être libéré de son assignation à résidence, où il avait été placé à son retour d'exil en octobre 2014, pour être revenu au pays sans autorisation et avoir mis en cause la légitimité du chef de l'Etat. Ses députés ont voté la destitution de M. Rajaonarimampianina.
 
- 'Le peuple va se lever' -
 
Les élus fidèles à M. Rajoelina, majoritaires au parlement, ont également voté la destitution.
 
M. Rajoelina avait pourtant soutenu M. Rajaonarimampianina à la présidentielle, pensant probablement en faire son homme de paille. Mais le président a vite pris ses distances, refusant notamment de nommer le Premier ministre désigné par M. Rajoelina.
 
Face à l'offensive de l'opposition, le pouvoir n'est pas resté inerte. Mardi, le gouvernement a fait couper huit des quinze émetteurs relais de la radio et télévision d?Andry Rajoelina, VIVA, pour "violation des textes en vigueur".
 
VIVA réplique depuis en diffusant en boucle un spot affirmant: "Stop, cela suffit, le peuple va parler, le peuple va se lever!".
 
L'enjeu de la bataille est important. Les donateurs internationaux, qui avaient fui en 2009, commencent tout juste à revenir, et l'économie sinistrée par les années de crise reprend quelques couleurs. Une nouvelle période d'instabilité pourrait mettre à mal ce fragile sursaut, dans ce pays parmi les plus pauvres du monde.
 
Cette crise intervient en outre au moment où les matières premières se vendent mal sur le marché mondial, réduisant les profits des compagnies minières. Ambatovy, l'une des plus grosses entreprises du pays, contrôlée par le géant canadien Sherritt, procède actuellement à une compression temporaire de personnel.
 
La communauté internationale, qui s'est beaucoup investie pour régler la crise politique et pour organiser les élections de 2013, redoute ouvertement cette situation tendue: "Il faut avouer que la stabilité politique est un contributeur au développement, et c?est surtout ça qui nous inquiète pour l'avenir", a déclaré vendredi la représentante de la Banque mondiale à Madagascar, Coralie Gevers.
 
La France, elle, "suit avec attention les développements à Madagascar" et espère "une issue politique".
 
Les Etats-Unis appellent à une résolution respectant "l'état de droit et à travers un dialogue national".