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Voyoucratie

25 mai 2015, 10:07

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Voyoucratie
Arvin Boollell l’a dit à la radio après l’incident survenu au siège du Parti travailliste, où un comité exécutif a été interrompu de façon musclée. C’est le fait de personnes qui n’ont à coeur que leur «intérêt personnel».
 
Nous sommes là à l’épicentre de ce qui menace notre pays, secoué ces derniers mois par des révélations de scandales les uns plus traumatisants que les autres.
 
Traumatisants car les coffres-forts débordant de dollars, les commissions de Dufry, les terres de l’État offertes aux cousines, les faveurs distribuées aux pandits amis et aux petites copines, les «Ponzi» tolérés... tout cela nous dit crûment à  quel point a régné, durant la dernière décennie, la féroce, la rugissante, l’effarante cupidité de ceux qui prétendaient frauduleusement veiller à l’intérêt de tous.
 
C’est dans ce mensonge-là que se trouvent la blessure et l’humiliation du peuple. Dans sa vie individuelle,  le citoyen ne saurait mettre de côté l’intérêt personnel ou familial. Dans la sphère privée, la recherche du profit est légitime puisque l’économie de marché est bien le seul système qui assure le bien-être matériel relatif du plus grand nombre. Mais ce qui maintient l’équilibre, dans les sociétés qui souhaitent demeurer démocratiques, c’est bien que le champ politique et l’action publique soient rigoureusement consacrés à la recherche de l’intérêt général.
 
Or, comme une tumeur maligne, l’intérêt personnel envahit le champ politique. L’intérêt personnel des politiciens qui perçoivent des avantages sous des formes diverses en contrepartie de la protection qu’ils procurent aux intérêts personnels de ceux qui les soutiennent. Nous voyons aujourd’hui à quelles faillites collectives cette corruption du politique par l’intérêt personnel peut mener  notre pays. Nous voyons maintenant où mène le mépris de l’intérêt général.
 
Mais si nous nous offusquons volontiers de la corruption, nous acceptons avec une complaisance déterminée ce qui en est la cause.
 
En premier lieu, nous avions accepté le communautarisme (ce qui inclut le castéisme), dont la logique première est de nier l’intérêt général pour légitimer la protection d’intérêts particuliers. Communautarisme qui abolit le raisonnement dans le choix politique pour établir la prééminence du «noubanisme» qui n’est rien d’autre que l’instinct de protection de son intérêt par rapport à l’intérêt concurrent de l’autre. Instinct cupide qu’exploitent les «socio-culturels» transformés en intermédiaires quémandeurs et distributeurs de faveurs communautaristes quasi-officielles.
 
En deuxième lieu, nous avions fermé les yeux sur le financement par des entreprises (cotées en Bourse ou non) de «partis politiques» qui n’ont pas d’existence légale, qui ne publient pas de comptes. Ce qui revient nécessairement à remettre de l’argent à des individus. Ce qui entraîne, obligatoirement, l’enrichissement personnel desdits individus (puisque le «parti» n’existe pas juridiquement), ce qui s’apparente à de la corruption active.
 
Enfin, nous avions accepté que l’école publique ne fasse rien pour transmettre aux élèves une conscience politique citoyenne par une éducation civique vigoureuse. Ce qui vous arrête, en dernière instance, lorsque vous êtes en position de faire passer sans encombre votre intérêt personnel avant l’intérêt général, c’est uniquement le poids dans une société donnée de la conscience politique du bien commun. Lorsque cette conscience est inexistante, pourquoi ne pas utiliser son droit de vote ou sa position de pouvoir dans le seul but d’une gratification égoïste?
 
Trois réflexions de fond, à mener à bien sûr le moyen terme, pour éviter le retour au pouvoir de la voyoucratie des intérêts personnels.
 
Dans l’immédiat, les citoyens bernés veilleront à ce que ceux pris la main dans le sac fassent l’objet d’actes d’accusation et soient promptement amenés devant la justice par les autorités chargées des poursuites publiques. Lesquelles autorités de poursuite pourraient laisser aux avocats de la défense le soin de s’occuper des discours sur les droits des accusés … et les moutons seront bien gardés.
 
 
* C’est Vous Qui Voyez !