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Grande-Bretagne: la difficile reconstruction du Labour

12 mai 2015, 11:42

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Grande-Bretagne: la difficile reconstruction du Labour
K.0 debout après sa pire déroute électorale en 20 ans, le parti travailliste entame un long processus de reconstruction qui l'oblige une nouvelle fois à s'interroger sur son identité et celle de son futur leader.
 
Pas de patron, pas de ligne directrice claire, des perspectives limitées: au lendemain des législatives du 7 mai, le Labour est un champ de ruines que son ex-leader, Ed Miliband, a contemplé une dernière fois vendredi avant de démissionner.
 
"Nous sommes au fond du trou", concède Tristram Hunt, un successeur potentiel.
 
Rayé de la carte en Ecosse, balayé en Angleterre, le parti est plongé dans sa pire crise existentielle depuis 1992, lorsque, après avoir perdu ses quatrièmes élections générales de suite, il se demandait s'il allait retrouver le pouvoir un jour.
 
Tiraillé sur la ligne politique à tenir, il avait réussi à sortir par le haut et par le centre grâce à Tony Blair et son concept du "New Labour" proche de la social-démocratie.
 
Certains rêvent d'un destin identique aujourd'hui, en gommant le virage à gauche opéré en 2010 par Miliband. Mais ils sont nombreux aussi à redouter le retour d'une longue nuit.
 
"Revenir de cette défaite sera incroyablement difficile", souligne Andrew Harrop, secrétaire général de la Fabian Society, un cercle de réflexion de gauche.
 
Il fait remarquer que le Labour doit reconquérir trois électorats différents: celui qui, à gauche, vote SNP en Ecosse. Les centristes qui votent conservateur en Angleterre. Et la classe ouvrière qui préfère l'Ukip populiste.
 
La tâche n'est pas simple. Éditorialiste au Guardian, Larry Elliott résume le problème ainsi: "le Labour a perdu en Ecosse parce que trop à droite et au sud et au centre de l'Angleterre parce que trop à gauche."
 
Les poids lourds des années Blair se sont bousculés sur les plateaux de télévision pour tirer à boulets rouges sur "Ed le rouge".
 
"Un foutu désastre", a fulminé John Prescott. Les Britanniques "n'ont plus d'appétit pour le vieux menu socialiste", a ajouté John Hutton.
 
Le plus remonté était sans doute Peter Mandelson qui a accusé Ed Miliband de s'être lancé dans "une gigantesque expérimentation politique, consistant à brandir notre poing en colère contre ces méchants conservateurs et attendre que le public nous démontre combien on lui a manqué".
 
- Déjà, le timing divise -
 
"Eh bien, on ne leur a pas manqué", a-t-il ajouté, pointant la "grave erreur" d'avoir surfé sur le thème "des pauvres contre les riches en ignorant complètement la vaste majorité qui se situe entre les deux".
 
Dans des termes plus mesurés, Tony Blair en personne a rappelé sa conviction que "la route vers le sommet passe par le centre".
 
Au milieu de ce tir nourri, Neal Lawson, président du think tank Compass, a lui appelé le Labour à se rapprocher au contraire du SNP écossais.
 
Pour savoir dans quelle direction le débat va basculer, la succession d'Ed Miliband offrira des indices précieux.
 
Les deux favoris offrent ainsi un profil très différent entre le trentenaire Chuka Umunna, au style très "New Labour", et l'expérimenté Andy Burnham, plus à gauche.
 
Les caciques du parti devaient se réunir mercredi pour fixer le calendrier du processus électoral.
 
Déjà, le timing pour l'élection divise le parti entre ceux qui veulent prendre le temps d'analyser la défaite et ceux qui estiment qu'on a trop attendu en 2010.
 
Il avait fallu patienter jusqu'à fin septembre pour voir Ed Miliband repousser la concurrence de son frère David qui exclut cette fois de participer à la course.
 
Le calendrier pourrait être le même, bien que Harriet Harman, qui gère les affaires courantes, évoque aussi juillet.
 
D'ici là, le parti devra trancher le rôle des syndicats dont le poids a été jugé trop important dans la désignation d'Ed Miliband par Peter Mandelson.
 
Ce qui lui a valu aussitôt la réplique cinglante de Paul Kenny, secrétaire général du syndicat GMB: "Lord Mandelson devrait se rallonger sur sa chaise longue au fond du jardin. Le monde a changé et j'espère qu'on ne retournera pas à l'époque où le Labour courtisait des millionnaires pour avoir des parrainages."