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Analyse: l’échec des élèves est aussi l’échec de l’école

5 mai 2015, 15:03

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Analyse: l’échec des élèves est aussi l’échec de l’école
Le constat de l’échec scolaire à Maurice est accablant ! Je constate que 3 553 élèves sur 18 223 ont échoué (après le resit) aux examens du Certificate of Primary Education (CPE) en 2013, ce qui fait 19,05 %. Et qu’au cours de la même année (2013), 3 853 élèves sur 15 460 ont échoué aux examens du School Certificate (SC), soit 24,92 %. Si on ajoute ces deux chiffres, on arrive au nombre de 7 406 élèves éliminés définitivement du système éducatif en une seule année. Et si on compilait les chiffres de ces dix, vingt, quarante dernières années ? Mais au-delà des chiffres, ce sont des êtres humains. Que deviennent-ils ? Où sont-ils ?
 
La responsabilité de tous est engagée : ministre, enseignants du primaire et du secondaire, formateurs du MIE, parents, etc. L’échec scolaire des élèves, c’est aussi celui de l’école. We are failing our children. Cela ne veut pas dire que tout le monde échoue : il existe encore, heureusement, des niveaux d’excellence et des enseignants qualifiés et dévoués.
 

■ FAILLES

Les failles de notre système éducatif sont multiples. Au niveau du CPE, il y a tous les maux qu’instaure cet examen de sélection : la compétition malsaine parmi les élèves, la frénésie financière des enseignants, l’obsession de réussite des parents, etc. Les élèves les moins doués, ceux et celles qui ont des problèmes, sont abandonnés au bord du chemin.
 
Mais le processus d’exclusion ne commence pas ici. Il ne faut pas s’arrêter à l’école. Les élèves qui échouent sont souvent victimes des inégalités sociales qui ont tendance à s’accentuer.
 
Une autre faille est de ne pas vraiment inculquer aux élèves le désir d’apprendre. N’oublions pas le système de notation qui ne permet pas de dire aux élèves où sont leurs lacunes, leurs manques. Ce sont souvent des notes sanctions, sans explications ni remèdes !
 

■ LES MOYENS D’ÉVITER L’ÉCHEC

Revoir par exemple le zonage ZEP (Zone d’éducation prioritaire) importée de la France qui l’a institué en 1981 et qui vient de le remplacer par le REP (Réseau d’éducation prioritaire). L’ancien zonage a souvent abouti au résultat inverse de ses objectifs en faisant partir des familles les moins défavorisées et en concentrant les difficultés dans les mêmes établissements scolaires, également fuis par les enseignants chevronnés.
 
La réforme annoncée consiste à concentrer les moyens sur les plus socialement handicapés, regroupés en 1 082 réseaux d’éducation prioritaire. Comme Maurice a copié la ZEP française, on pourrait s’inspirer de la réforme en cours en France.
 
Par ailleurs, il faudrait une équipe de professionnels – assez nombreux – attachés à plein-temps au ministère de l’Éducation pour dépister quotidiennement, dès la maternelle, les divers troubles (auditifs, visuels, dyslexiques, psychologiques, etc.) chez les enfants et y remédier. Je me souviens qu’à un moment il n’y avait qu’une orthophoniste à temps partiel au ministère !
 
Par ailleurs, il est indispensable de prendre en charge les élèves en grande difficulté scolaire. Il faut prendre conscience que chaque élève qui échoue et qui est «éliminé» après le CPE ou le SC est un gaspillage de capital humain, notre seule richesse. Je voudrais ajouter que les «recalés», comme on les appelle, sont ou deviennent souvent analphabètes. En effet, j’ai rencontré en 1996 à Bambous, dans le cadre de l’Étude pluridisciplinaire sur l’exclusion à Maurice, deux adultes (18 ans et 26 ans) qui avaient fréquenté l’école primaire et qui ne pouvaient ni lire ni écrire ! C’était la confirmation que le processus d’alphabétisation n’est pas irréversible.
 

■ L’ÉCHEC SCOLAIRE EST-IL UNE FATALITÉ ?

Comme l’a dit André de Peretti, ancien administrateur de l’Institut de la recherche pédagogique de Paris, il faut offrir plusieurs portes de sortie aux élèves en échec scolaire, il ne faut pas qu’ils soient «pris comme des rats» dans le système. La filière professionnelle est l’une de ces portes, mais il ne faut pas qu’elle soit dévalorisée aux yeux des élèves et des parents. Au-dessus de tout, il faut s’interroger sur la finalité de l’école : une immense machine à tri ou un lieu de vie et d’apprentissage ? À mon avis, l’école devrait être comme une école de natation dont la finalité est que tous sachent nager tout en ne négligeant pas les futurs nageurs olympiques !
 
 
MAURITIUS EXAMINATIONS SYNDICATE
 
Cambridge School Certificate 2013 - Pass rate
 
         Entered Absent Examined Passed Percentage
 
Boys   7 141     129        7 012          4 930          70.31
 
Girls  8 319      66          8 253         6 531            79.13
 
Total  15 460  195         15 265       11 461          75.08
 
 
 
Source : Mauritius Examinations Syndicate