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Daphney Moura-Lafraisière: «Je n’ai pas peur de côtoyer les morts»

18 mars 2015, 00:17

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Daphney Moura-Lafraisière: «Je n’ai pas peur de côtoyer les morts»

À mort les préjugés ! C’est avec un sourire enjoué, une démarche élégante et les talons aiguilles qui vont avec que Daphney Moura-Lafraisière, la Deputy Managing Director de Moura Undertakers Ltd, nous reçoit dans les locaux de l’entreprise à Belle-Rose. Ce qui frappe au premier abord, c’est la passion qu’elle porte à son métier et à son secteur d’activité que d’aucuns, du reste, auraient tendance à fuir. Mais comme la principale concernée nous l’explique,  elle baigne dans ce milieu depuis son enfance car les pompes funèbres, c’est avant tout une affaire de famille.

 

Connaître le métier sous toute les coutures

 

Loin d’être muette comme une tombe, la jeune maman nous parle de son parcours et de son métier, et s’il arrivait que celui-ci la fasse frémir, ce serait plutôt de bonheur et d’enthousiasme.  Âgée de 34 ans, Daphney est entrée de plain-pied dans l’entreprise familiale il y a 10 ans, après avoir fait des études en management et en secrétariat.

 

«J’ai aussi effectué des stages dans des entreprises, notamment dans le service clientèle afin d’acquérir de l’expérience», explique-t-elle. En intégrant le business familial aussi jeune, elle a eu l’occasion de connaître le métier sous toutes les coutures, que ce soit au niveau administratif, de la production et du service client.

 

En parlant de service client, cela n’est-il pas traumatisant de voir la mort de si près tous les jours ? «Non, cela ne me fait pas peur car comme mon père me l’a toujours dit : il faut avoir peur des vivants, pas des morts !» s’exclame- t-elle. Mais d’ajouter que depuis qu’elle est maman, elle éprouve une certaine sensibilité lorsqu’elle à affaire à des enfants décédés.

 

«Le tout est de garder la tête sur les épaules et d'être fort afin d’apporter du réconfort aux familles endeuillées», fait-elle ressortir.

 

Développer l'empathie

 

Mais à force de voir des cadavres et de faire face à la tristesse, ne risque-t-elle pas d’être blasée, voire cynique ? «Pas du tout. Au contraire, ce métier permet de développer son empathie et de prendre conscience de ce que qui compte le plus, c’est-à-dire la vie, et cela, malgré toutes les choses matérielles que l’on possède».

 

Aussi a-t-elle réalisé, que si la mort pouvait autrefois représenter quelque chose de sinistre et de lugubre, elle peut parfois être un «moment de libération, la fin d’une souffrance», surtout quand le défunt s’en va après une longue maladie.

 

Qu’en est-il de la vie de famille ? Comment fait-on pour jongler entre vie privée et vie professionnelle lorsqu’on exerce une profession qui vous sollicite à toute heure de la journée et de la nuit ? Celle qui est la première femme à prendre la tête de Moura Undertakers en 90 ans avoue qu’il est en effet difficile de couper la poire en deux, tout en soulignant qu’il faut une  bonne gestion du temps.

 

«Dans certains cas, il m’arrive de donner des instructions de chez moi pendant que mon père et mon frère sont sur le terrain», dit-elle. Est-ce un métier qui attire les femmes ? Selon Daphney Moura le secteur se féminise de plus en plus. Elle va même jusqu’à affirmer que les femmes ont «plus de force émotionnelle pour faire ce métier».

 

En tant que directrice, elle voudrait surtout mettre l’accent sur l’accompagnement aux familles endeuillées, car elle estime que c’est un aspect qui manque à ce métier, au risque de vite basculer dans le commercial. «Il faut toujours prendre en compte l’aspect humain». L’entreprise travaille en ce moment sur ce service.

 

«Ce n’est pas une mine d’or»

 

Justement, qu’en est-il du porte-monnaie, cette victime collatérale de la grande faucheuse ? «Il est vrai que beaucoup de gens pensent que les pompes funèbres se font de l’argent sur leur dos. Mais il faut savoir que chaque service proposé comporte un coût et contrairement à ce que l’on croit, ce n’est pas une mine d’or», précise Daphney.

 

Elle ajoute par ailleurs, que tout comme l’on s’attelle à offrir le meilleur à ses proches de leur vivant, il en va de même lorsqu’ils décèdent. Voilà, dit-elle pourquoi les gens n’hésitent pas à débourser afin de rendre un dernier hommage à un être cher.

 

Compte-t-elle rester dans le business familial jusqu’à la mort ? «Oui bien sûr ! C’est un métier qui me passionne et je compte bien continuer», affirme notre interlocutrice. Car pour elle, la beauté du métier, c’est d’entendre les proches du défunt dire merci, «savoir qu’on a été la pour les aider à dire au revoir à leur proche, dans l’amour et le respect…»