Les intrigues de plusieurs contes de fées bien connus se croisent afin d’explorer les désirs, les rêves et les quêtes de tous les personnages. Cendrillon, le Petit Chaperon rouge, Jack et le haricot magique et Raiponce, tous sont réunis dans un récit où interviennent également un boulanger et sa femme qui espèrent fonder une famille, mais à qui une sorcière a jeté un mauvais sort…

LA NOTE : 6/10

La comédie musicale américaine oscille entre le bon (Evita d’Alan Parker et Sweeney Todd de Tim Burton) et le passable (Les Misérables de Tom Hooper, Chicago de Rob Marshall). On appréciera également la bluette Mamma Mia qui, dans sa légèreté, nous avait surtout conquis par sa bande-originale tirée du répertoire d’Abba. Quid de Into the Woods, dernier succès américain en date, avec nominations aux Golden Globes et plus de 100 millions de dollars au box-office local ?

L’oeuvre de Stephen Sondheim, Into the Woods, est bien connue des Américains qui chérissent Broadway mais, depuis sa création en 1986, le musical s’avère être obscur pour les Français qu’on a volontairement épargnés jusqu’à présent tant le programmene lui était pas, par vocation, destiné. Cette fameuse mode des prestations vocales scéniques sur des histoires rabattues, devenue également hexagonale, rend sa présence sur nos écrans finalement probable, alors que son distributeur (Disney) ne se fait pas trop d’illusion, après la déconvenue des Misérables sur notre territoire, quand bien même ce dernier avait triomphé aux USA.

Into the Woods s’érige en pastiche du conte au croisement de The Voice. Des stars viennent y pousser la chansonnette, lors d’une succession de scènes aux allures de sketchs forestiers, sans la moindre crédibilité concernant leurs réels talents vocaux : tout le monde il est beau, tout le monde il chante bien, mais surtout tout le monde peut remercier les prouesses technologiques qui permettent de faire des miracles avec leurs voix si frêles. Cette nuance insupporte quelque peu, Chris Pine en Prince Charmant qui joue au galant chanteur, on n’y croit pas... Et que dire de la présence d’Anna Kendrick, l’une des actrices les plus fades de sa génération, en Cendrillon, elle n’a aucune grâce. Emily Blunt, figure respectable du cinéma anglophone, est, elle aussi, peu crédible quand sa voix s’envole tant elle paraît artificielle dans ce spectacle où tout est factice.

Pot-pourri musical, narratif et héroïque, Into the Woods aime l’emprunt aux mythes culturels d’antan pour forger sa propre mythologie. Une sorcière des bois jouée par Meryl Streep, excellente pour sa part, entraîne un boulanger (James Corden, issu du soap britannique bien populaire comme Fat Friends et Gavin & Stacey) et son épouse (la belle Emily) à la recherche d’éléments magiques dans une forêt de l’imprévu, pour retrouver la fertilité. Ils vont y rencontrer Raiponce, deux princes plus ou moins charmants, Cendrillon, le Chaperon rouge et un loup joué fugitivement par Johnny Depp, et même Jack et ses haricots magiques. Cet enchevêtrement d’éléments du merveilleux noue un script sans queue ni tête qui s’étend au-delà du raisonnable, puisque cette succession de chansons, ni pires ni meilleures que celles de son auteur, atteint péniblement les deux heures de spectacle. L’illusion des premières scènes laisse entrevoir un beau spectacle, quelques moments pêchus. Les instants agréables d’une féerie retrouvée s’enchaînent, pour finalement s’embourber dans le vaudeville bucolique qui a tant réussi à Shakespeare (Le Songe d’une nuit d’été) et qui ici indispose lors d’un dernier acte marqué par l’intrusion d’un géant du royaume des nuages et des vagabondages du prince. De mauvais effets spéciaux, un cabotinage général, un script en roue libre... La fin est un vrai naufrage.

FICHE TECHNIQUE

Genre : Comédie musicale

Durée : 2 h 05

De : Rob Marshall

Avec : Meryl Streep, Emily Blunt, James Corden, Anna Kendrick, Chris Pine, Tracey Ullman, Christine Baranski, Johnny Depp

Salles : Star Caudan, Bagatelle, La Croisette