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Récolte de letchis: les planteurs atterrés

19 octobre 2014, 16:53

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Récolte de letchis: les planteurs atterrés
Qui ne se réjouit pas tous les ans, à partir du mois d’octobre, de voir apparaître les fruits de saison comme les letchis ou les mangues? Cette fin d’année, pourtant, risque d’être décevante: bon nombre de planteurs du Nord ne sont pas satisfaits de leur récolte. Ils affirment que les vergers doivent faire face à de nombreux types de nuisances.
 
Nous sommes allés à la rencontre de Krishna Seechurn, un des planteurs de l’Arsenal Letchi Growers Cooperative Society. Celle-ci réunit 25 planteurs de letchis. D’habitude, leur production est non seulement écoulée dans l’île, mais une partie est également réservée à l’exportation. Le sexagénaire s’occupe d’un arpent de terre sous culture de manguiers et de letchis. Il affirme qu’à cette époque, habituellement, il commence à camper dans son verger afin de chasser les chauves-souris et les voleurs. Mais cette année, les choses sont différentes. 
 
«Sa period-la, nou abitie pe dormi leve lamem. Me sa lane-la, pena enn letchi kinn mir. Lor la ena zis enn-de pie kinn raporte. Bizin atann plis ki enn mwa parla pou kav vann inpe letchi la. Nounn fer boukou depense nou pa pou kapav kouver fre», soutient le planteur.
 
En effet, il suffit d’un coup d’œil à la plantation pour voir que les letchis ont mauvaise mine. Sur les arbres, on ne voit que quelques grappes de fruits encore verts. Certains n’ont que des feuilles. Selon les planteurs, c’est la disparition des mouches à miel qui expliquerait la maigre récolte prévue cette année. Car ces insectes sont essentiels aux arbres fruitiers. «Depi lontan nounn remarke ki mous dimiel na pa pe vini. Nou pena boukou explicasion lor la me se ki nou kone, se ki mous dimiel frazil. Kan ena la fime, zot pa tini. Sa bann tan-la, inn ena boukou dife dan kann, li kapav enn koz de zot disparision», poursuit Krishna Seechurn.
 
L’an dernier, la récolte de letchis était d’environ 45 tonnes pour cette coopérative d’Arsenal qui compte quelque 25 arpents de terre. Mais cette année, les planteurs sont pessimistes. Selon eux, la récolte ne dépassera pas les deux tonnes. «Nu ti bien vande lane dernier. Sa lane-la, zafer pa bon. Nounn gagn inpe mangue, me letchi la bien mins», affirme Baboo, un autre planteur.
 
Quant aux chauves-souris, elles représentent toujours une menace pour les arbres fruitiers. Les producteurs de fruits locaux affirment même avoir remarqué un changement dans le comportement de ces animaux. «Lane dernier, nou ti pe kapav fer per bann chauvesouris me sa lane-la, zot mem pa per nou. Zot paret inn abitie ar nou, zot envol anba e zot manz mangue, papaye, letchis ek tou seki zot trouve kapav manze», affirme notre interlocuteur. 
 
Comme il est interdit de tuer des chauves-souris, qui sont une espèce protégée, les planteurs doivent rivaliser d’ingéniosité pour les éloigner des arbres. Leur dernière trouvaille: accrocher du bomli aux branches des  manguiers. Ils font tremper ces poissons séchés avant de les placer le long des branches. «Chauve-souris kouma senti sa bomli-la, zot ale. Zot pa kontan so loder», explique Krishna Seechurn.
 
De plus, cette année, après avoir récolté les mangues, les planteurs d’Arsenal disent avoir été obligés d’abattre les arbres: «Nounn fer ca pou empes chauvesouris vini. Dan kat an, li pou repouse. Nou nepli kone ki pou fer», explique Baboo. 
 
Les autorités proposent bien aux producteurs de fruits locaux de se servir de filets. Mais difficile de les installer sur des arbres mesurant plus de six mètres. Surtout si l’on considère que sur 25 arpents de terre, il y a plus de 2 500 arbres à protéger.
 
Et comme un malheur ne vient jamais seul, les mouches à fruits ont fait leur apparition en grand nombre. Les planteurs avouent avoir fait usage d’insecticides pour éliminer ces parasites. Ils affirment que les mouches à fruits sont encore plus difficiles à gérer que les chauves-souris. «Li posib ki bann insektisid la touy bann mous dimiel ki deja bien rar. Me nou pena swa. Nou oblize eliminn bann mous a fri. E sel moyen ki nou ena, se mett insektisid lor bann pie», ajoute Krishna Seechurn.
 
Il fait aussi état de la présence de corbeaux dans les environs du verger. Les producteurs sont d’avis que la présence des chauves-souris attire les corbeaux. «Nou pa gagn drwa touy chauves-souris me depi ki zot la e ki zot anvol anba, nou remarke ki bann korbo inn koumans vini zot ousi», témoigne un autre planteur.
 
Du coup, ce n’est que dans un peu plus d’un mois que les planteurs envisagent de camper à nouveau dans le verger, histoire de veiller sur la maigre récolte de letchis qui  s’annonce. D’ailleurs, ils annoncent déjà que le prix de ces petites douceurs prendra l’ascenseur à cause de sa rareté sur le marché. En revanche, le prix de la mangue restera abordable puisque sa production est satisfaisante cette année.