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Conditions de travail: Se sentant exploités, des travailleurs indiens veulent rentrer chez eux

18 janvier 2023, 17:00

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Conditions de travail: Se sentant exploités, des travailleurs indiens veulent rentrer chez eux

Beaucoup de mystère plane autour de la venue de ces travailleurs indiens. Ils disent ne pas avoir de contrat de travail et avoir pu malgré tout passer le contrôle de l’immigration à l’aéroport. Depuis leur arrivée, ils ont travaillé non-stop et n’ont toujours pas perçu leur salaire. Une situation qui révolte leur représentant syndical Fayzal Ally Beegun, qui a référé le cas au ministère du Travail.

Les quatre employés exploités ont répondu à une annonce en Inde qui disait que des postes étaient vacants au dans une compagnie électrique basée à Vacoas, à Maurice. Quelques semaines plus tard, ils embarquaient pour une destination de rêve. Or, dès leur arrivée, le 2 décembre, ils n’ont pas eu le temps de souffler. Ils relatent avoir été immédiatement munis d’outils et avoir commencé à travailler, entrant dans le vif du sujet immédiatement.

«D’après leurs dires, tous les jours, ils ont commencé leur journée à 7 h 30 et n’ont fini que vers les 19 heures, voire 20 heures. Ils ont aussi travaillé lors des congés publics. Sans arrêt, et au 15 janvier, ils n’avaient toujours pas touché leur salaire», confie Fayzal Ally Beegun.

Le syndicaliste est outré par le traitement réservé à ces étrangers. «Quand un inspecteur du bureau du travail a appelé un représentant de la compagnie en question, on lui a dit que le salaire des travailleurs avait été envoyé en Inde.»

Or, avance Fayzal Ally Beegun, la loi mauricienne n’autorise pas que l’argent perçu par des travailleurs étrangers employés à Maurice soit envoyé dans leur pays d’origine. Cela, depuis le cas des ouvrières chinoises en 2002 qui avaient marché de Saint-Félix à l’ambassade de Chine, à Belle-Rose, pour protester contre leurs conditions de travail. Parmi leurs revendications, elles avaient avancé que l’argent qui devait être envoyé à leurs proches ne leur était jamais parvenu. «Aujourd’hui, les travailleurs doivent récupérer leur dû, soit en argent soit sur un compte en banque ici à Maurice. Ils décideront par la suite s’ils comptent l’envoyer à leurs proches.»

Selon le syndicaliste, les travailleurs lui ont même fait part des menaces qu’ils reçoivent au quotidien au sein de la compagnie. «Il me semble qu’ils sont venus à Maurice pour être exploités. Déjà qu’ils disent ne pas avoir de contrat de travail. À l’immigration, ils disent avoir montré une lettre et ils sont passés.» Le département Special Migrant Unit va également ouvrir une enquête sur ces allégations. «Ils ont pu découvrir Port-Louis, lundi, au moment de venir déposer au ministère. Car leur quotidien se résume à dortoir, travail, dortoir, et c’est tout.» Aujourd’hui, ces travailleurs ne veulent qu’une seule chose : rentrer chez eux. «La question que je me pose est de savoir comment ils ont pu travailler sans contrat, sans permis de séjour. J’espère que l’unité spéciale du ministère du Travail va faire la lumière dans cette affaire et les aider à obtenir leur salaire et leurs bagages.»

Fayzal Ally Beegun a été touché par les propos d’un des travailleurs qui, exténué, par ces événements, a même pensé à mettre fin à ses jours. «Je lui ai longuement parlé pour lui ôter cette idée de la tête. Il nous a montré l’état dans lequel se trouve l’un de ses pieds. Quand il a demandé qu’on le transporte à l’hôpital, cela lui a été refusé.» Fayzal Ally Beegun espère que les inspecteurs du travail vont ouvrir une enquête sur cette compagnie. «On ne peut pas faire des employés vivre dans la peur. Je pense que les compagnies en général devraient organiser des sorties pour leurs travailleurs afin que ces derniers changent d’air et visitent en même temps notre île.»

Justement, le ministère a enquêté sur ces allégations. Et selon l’un des responsables de ladite compagnie, cette dernière est un sous-contracteur qui travaille pour le Central Electricity Board (CEB). Les quatre ouvriers indiens, employés d’une firme indienne, sont venus à Maurice en utilisant un business visa pour ce projet gouvernemental. Le responsable a aussi confié que comme ces travailleurs sont déjà des employés de la firme indienne, ils ont obtenu leur salaire de cette firme, versé en Inde. Le responsable a nié que ces travailleurs n’ont pas eu de jours de repos et a fait un autre responsable confirmer qu’ils n’ont pas travaillé les dimanches et les jours fériés. Chaque employé a perçu la somme de Rs 21 450, représentant les salaires impayés et le bonus de fin d’année, hier, avant de prendre l’avion pour rentrer en Inde.

Rencontre ministère du travail et Fayzal ally Beegun aujourd’hui

Le syndicaliste Fayzal Ally Beegun rencontrera des représentants du ministère du Travail aujourd’hui. Ils entameront des discussions autour de la lettre envoyée par le syndicaliste au Premier ministre en décembre dernier. «J’ai reçu un appel du bureau du Premier ministre, le 30 décembre, me disant que ce dernier, pris par ses engagements, a référé ma lettre au ministère du Travail.»

En effet, dans sa lettre, Fayzal Ally Beegun a fait une requête pour que les travailleurs des usines qui sont passées sous «receivership» puissent obtenir une «compensation de reconnaissance» pour le travail effectué. «Si les usines ont fermé, ce n’est pas de la faute des ouvriers. Ils ne peuvent être mis en cause face à certaines largesses des directeurs de certaines compagnies. Il y a des usines qui n’ont même pas donné un sou de compensation aux travailleurs. Après 50 ans d’existence, le gouvernement pourrait être reconnaissant envers ceux qui ont contribué à l’économie du pays.»

Outre cet aspect, le syndicaliste discutera aussi d’une éventuelle compensation qui pourrait être versée aux travailleurs étrangers après leurs bons et loyaux services. «On devrait voir quelle loi pourrait être amendée.» Il parlera aussi des conditions de travail pour les employés du secteur privé lors des pluies torrentielles. «Ceux du secteur public restent à la maison, alors il ne faut pas jouer avec la vie de ceux qui bossent dans le secteur privé. Pourquoi ne pas accorder un jour de congé public à tous ?» Tous ces aspects seront discutés au ministère du Travail aujourd’hui.