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Drogues: ni amende ni prison pour les consommateurs en 2023

30 juin 2022, 16:08

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Drogues: ni amende ni prison pour les consommateurs en 2023

Le «Drug Offenders Administrative Panel» s’active. Selon Sewraz Corceal, «Programme Coordinator» du National Drugs Secretariat, qui animait un atelier de travail pour les travailleurs sociaux, hier, la prochaine étape est la mise en place de ce projet. Celui-ci prévoit un traitement plutôt que l’emprisonnement des consommateurs de drogue. Une démarche qui devrait se concrétiser d’ici 2023.

La prison, c’est fini. Place à la réhabilitation et désintoxication. Du moins, c’est ce qui est prévu d’ici l’an prochain pour les consommateurs de drogue. Le projet du Drug Offenders Administrative Panel avance à grands pas, comme confirmé par Sewraz Corceal, Programme Coordinator du National Drugs Secretariat (NDS). Ce dernier animait, avec Sandya Bohanee, Programme Officer, et le Dr Appalsamy Appadoo, NDS Coordinator, un atelier de travail à l’intention des travailleurs sociaux des ministères de l’Éducation et de la Jeunesse et des sports, à l’hôtel Voilà Bagatelle, hier. Objectif : passer en revue l’usage mondial des drogues ainsi que l’évolution de ces stupéfiants à Maurice. Le Dr Appalsamy Appadoo a mis en exergue les «substance abuse disorders» et les altérations du cerveau face à la consommation de la drogue. Était également au menu la situation locale avec une étude réalisée en 2021 auprès de 602 usagers de drogues.

Consultations en cours

D’après Sewraz Corceal, un road map est élaboré dans le cadre du Drug Offenders Administrative Panel. «Nous travaillons en collaboration avec plusieurs partenaires dont les organisations non gouvernementales (ONG), le State Law Office, la police, entre autres. Nous étudions des modèles des autres pays et voyons comment faire pour Maurice. Après diverses consultations, le Premier ministre l’a présenté au Cabinet et nous en sommes à la phase de mise en place», a-t-il déclaré. Celle-ci sera assurée par le ministère de la Santé. À ce niveau, a-t-il poursuivi, des consultations sont en cours et cellesci devraient accélérer la structuration.

D’après Sewraz Corceal, des amendements juridiques seront nécessaires. Car, selon les règlements actuels, les consommateurs de drogues encourent des amendes et peines d’emprisonnement. Mais avec ce projet, des protocoles sont développés pour que les usagers de drogues soient traités au lieu d’être sanctionnés. «Cela concernera tous types de drogues utilisées par des personnes qui ne sont pas des dealers. Elles seront prises en charge pendant une durée fixe. Ces paramètres seront définis par les lois et les protocoles. Des suivis sociaux et communautaires seront également assurés. C’est d’ailleurs pour cela qu’il faut impliquer les ONG.» Très probablement, ces nouvelles dispositions entreront en vigueur en 2023, a-t-il assuré.

Outre cette future stratégie, les pratiques des usagers de drogues ont largement été discutées. Les résultats d’une recherche du NDS et les autorités locales en collaboration avec la Dr Lisa Johnson, consultante internationale travaillant pour l’Organisation mondiale de la Santé, ont été disséminés. Entrepris en septembre 2021, le rapport officiel a été lancé en février 2022. La diffusion est en cours. Quels indicateurs en ressortent ? Sur 602 usagers de drogues, 75 % ont entre 18 et 39 ans. 44,6 % des femmes ont 18 à 24 ans, et 28 % des hommes sont dans cette tranche d’âge. Et entre 25 à 29 ans, les femmes sont également plus nombreuses comparées aux hommes en termes d’utilisation de drogues, soit avec un taux de 28 % contre 18,8 % sur la totalité. Au-delà de 50 ans, les taux chutent à 11 % chez les Mauriciens et à 1 % seulement chez leurs homologues féminins. Sur le plan professionnel, 76 % des usagers de drogues sont en situation d’emploi.

Quel est l’état des lieux de leurs addictions ? L’alcool ne semble pas intéresser ces Mauriciens puisque 83,2 % affirment ne pas en avoir consommé durant le mois passé. D’ailleurs, 53,1 % affichent une fréquence d’une fois par mois ou moins, 21 %, deux à quatre fois par mois, 18,6 %, deux à trois fois par semaine et 7,4 %, plus de quatre fois par semaine. En revanche, pour le cannabis, 87,6 % des participants affirment en avoir déjà consommé. 203 usagers soutiennent avoir effectué leur première consommation de cannabis entre 15 et 17 ans. Chez les petits de moins de 11 ans, ce nombre est de huit comparé à 90 chez les adolescents de 12 à 14 ans, ce qui indique la forte vulnérabilité des jeunes à ce fléau. 11 % des répondants soulignent qu’ils ne consomment que du cannabis. Ce groupe est composé à 79,2 % d’hommes et à 20,8 % de femmes. Sur le plan éducatif, ces usagers exclusifs du gandia sont 28,9 % à avoir terminé leurs études primaires, 34,6 % à avoir fréquenté un collège secondaire et 14,5 % à s’être adonné aux études universitaires.

Quant aux drogues non injectables, 76 % des participants les utilisent quotidiennement, dont 46 % entre deux à trois fois par jour. Parmi les stupéfiants les plus consommés sur une base mensuelle, on trouve l’héroïne à 54 % et les drogues synthétiques à 41 %. Concernant la drogue synthétique, 65 % des usagers affirment avoir déjà consommé des drogues synthétiques. 73,5% d’entre eux sont en emploi et 28,5 % ont déjà été sujets à des arrestations.

Le volet qualitatif de l’étude révèle aussi qu’il y a une hausse dans l’usage des drogues par les femmes. «Plus de filles et de femmes consomment désormais les drogues. Cependant, elles le font plus discrètement et sont plus prudentes lors de leurs approvisionnements de ces produits», indique la recherche. Pourquoi cette recrudescence féminine ? D’après Sewraz Corceal, certaines d’entre elles peuvent être dans le «mainstream» de la consommation et beaucoup plus sous tapis probablement, comme indiqué par les discussions de groupe pour l’étude. «Il faut voir ce qu’on peut faire à ce niveau.»