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Résurgence du Covid-19 aux Seychelles: quel modèle pour la réouverture de nos frontières ?

13 mai 2021, 21:00

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Résurgence du Covid-19 aux Seychelles: quel modèle pour la réouverture de nos frontières ?

Rouvertes depuis le 25 mars aux touristes, les Seychelles ont récemment dû faire marche arrière. En effet, l’archipel est sujet à une troisième vague, avec une moyenne de 134 nouvelles contaminations par jour. Pourtant, en janvier 2021, ce premier pays africain à avoir lancé sa campagne de vaccination a finalement permis à 61% de sa population de compléter cet exercice. Or, ce taux, brandi comme fer de lance pour sa relance touristique, incarnait un modèle pour Maurice.

Maintenant que celui-ci ne tient plus la route, quelle stratégie doit s’appliquer ? Pour Daniel Saramandif, président de l’Association of Tourism Professionals, Maurice doit élaborer son propre modèle. «À la réouverture des frontières aux Seychelles, il était essentiel d’attendre un mois pour l’évolution pandémique. Maintenant, on voit que le virus continue. De plus, notre population et celle des Seychelles sont différentes en nombre et spécificités. Chez nous, les habitants vivent davantage en famille. Dans notre cas, il faut vraiment former nos citoyens pour apprendre à vivre avec le Covid-19», déclare-t-il.

Comme modèle pour la réouverture de nos frontières, Daniel Saramandif évoque une possible réduction de la durée de la quarantaine. Par exemple, celle-ci pourrait passer de 14 à sept jours. Cependant, rappelle-t-il, cela ne nous exemptera pas systématiquement des contaminations au Covid-19. «On ne peut prendre des modèles des Maldives ni des Seychelles, qui ne reflètent pas notre réalité», ajoute-t-il.

D’ailleurs, depuis le 9 mai 2021, et ce, jusqu’à nouvel ordre, les Maldives ont renforcé leurs restrictions de voyages de l’Afghanistan, du Bangladesh, d’Inde, du Pakistan, du Sri Lanka, entre autres. De son côté, Charles Ng, directeur d’Atom Travel, suggère l’attente plutôt qu’une précipitation à rouvrir nos frontières. «Il faut mesurer l’évolution du Covid-19. Maurice n’est pas le seul pays frappé par la résurgence de la pandémie. Le monde entier est affecté. De plus, en Inde, en Afrique du Sud et d’autres pays, les nouveaux variants sont apparus en dépit de la vaccination.»

Paradoxalement, la vaccination, qu’on auréole comme solution miracle au Covid-19, possède ses limitations. «Je pense qu’on priorisera les voyageurs ayant fait une vaccination complète, soit les deux doses, et que ce sera ainsi dans le domaine touristique. Maintenant, le problème mondial auquel on assiste aujourd’hui relève des nouveaux variants en Inde et en Afrique du Sud, notamment. Le vaccin n’est pas à 100 % efficace contre ces variants. Il faudra faire avec. Avec la vaccination, on n’est protégé que partiellement dépendant du produit injecté», affirme Daniel Saramandif. En sus des employés du tourisme, il suggère que la vaccination s’étende à leurs proches.

Reprenant l’exemple des Seychelles, le Dr Patrick How, président de l’Association des médecins privés, mentionne que 65 % des personnes ayant contracté le Covid-19 n’étaient pas vaccinées. Quant aux 35 % restants, il s’agit d’habitants soumis à une seule dose du vaccin ou à la seconde mais présentant parallèlement des co-morbités. «Qui a dit que le vaccin protège à 100 % de cette pandémie ? Pfizer dispose d’un taux de 95 %, Astra Zeneca de 76 % et Johnson and Johnson de 60 %. Donc, il y a des cas où le virus passe. Même les vaccins contre le tétanos ou d’autres maladies n’assurent pas une protection à 100 %», souligne le médecin.

«Savoir vivre avec ce virus»

Cependant, renchérit-il, il ne faut pas occulter la vaccination. De plus, avance-t-il, plus de 75 % des patients guéris du Covid-19 continuent à présenter des symptômes à long-terme (Long Covid-19 symptoms). D’après lui, ceux-ci incluent des vertiges, l’anxiété et des défaillances au niveau des organes dans les situations plus graves. Ainsi, ces séquelles sont également prévisibles. En termes de modèle touristique, le médecin s’aligne sur la vaccination. «Toutefois, je ne dis pas que c’est la seule solution. Elle est primordiale pour la réouverture des frontières. On doit aussi savoir vivre avec ce virus», souligne le Dr Patrick How.

Est-ce à dire que tous les touristes doivent présenter un carnet vaccinal et qu’en est-il des droits de la personne ? Ces débats restent entiers, répond le président de l’Association des médecins privés. «Les Français ne sont pas trop en faveur du carnet vaccinal, privilégiant les droits humains. Par contre, les AngloSaxons soutiennent l’obligation de la vaccination. À Maurice, il n’y a pas à sortir de là. Il faut vacciner les habitants pour atteindre l’immunité collective. Les Seychelles ne donnent pas le bon exemple dans cette optique.» Sachant que 61 % de la population de l’archipel a été vaccinée et qu’il faudrait un taux de vaccination complète (deuxième dose comprise) plus élevé, estime-t-il.

Maurice doit-elle revoir son taux à la hausse pour la vaccination ? Selon le médecin, 60 % démontrent qu’on rejoint l’objectif collectif. À 70 %, c’est un très bon taux, et à 80 %, encore plus. Mais on ne peut vacciner à 100 % comme certains développent des effets secondaires, poursuit-il. En complément à cette méthode, les gestes barrière doivent perdurer. «Aux Seychelles, il se peut que les habitants aient enlevé tous les masques. Les touristes qui s’y rendent aussi doivent en faire de même. Le vaccin empêche de développer une maladie grave et de transmettre le virus. Mais ce n’est pas une protection complète.»

Abondant dans ce sens, Charles Ng appelle au maintien des mesures sanitaires en complément à la vaccination. «Aucun vaccin au monde ne peut vous protéger à 100 %. Dans le monde, une bonne partie des habitants n’ont pas fait de seconde dose. Si Maurice contracte ces nouveaux variants, ce sera chaotique», indique-t-il.

Quant à Arvind Bundhun, directeur de la Mauritius Tourism Promotion Authority, il affirme que la clé de la réouverture est la campagne vaccinale. «Maurice a déjà des mesures extrêmement strictes, à l’exemple de la quarantaine de 14 jours. Pour le moment, il faut attendre que la vaccination soit bien enclenchée pour rouvrir tranquillement», évoque-t-il. Néanmoins, Maurice est confrontée à une autre réalité, rappelle-t-il.

En effet, nos marchés émetteurs de touristes de- meurent fermés, excepté le Royaume-Uni, qui autorise ses habitants à venir à Maurice et de se soumettre à cinq jours d’isolement au retour. À l’inverse, il nous est impossible d’accueillir des touristes d’Inde, qui représente 10 % de notre marché, d’Afrique du Sud, de La Réunion et surtout de la France, qui prône des voyages domestiques sur son territoire jusqu’en mai 2021.

Évidemment, Maurice s’accroche toujours au vaccin comme remède miracle contre le Covid-19 et semble minimiser le fait que d’autres maladies sont vectrices de mortalité. À ce sujet, Arvind Bundhun renchérit que la sécurité sanitaire reste primordiale et doit être maintenue.

Les arrivées touristiques chutent de 99 % de janvier à avril 2021

Il fallait s’y attendre. La fermeture des frontières en mars 2020 a fait gravement chuter les arrivées touristiques. De janvier à avril 2021, celles-ci ont en effet baissé de 99 %. Soit 2 830 touristes recensés contre 304 852 pour la même période l’année dernière. À titre de comparaison, on a enregistré, en janvier dernier, 1 232 arrivées alors que pour le même mois l’année dernière, le pays en comptait 137 419. Évidemment, c’était bien avant l’avènement de la pandémie du Covid-19. Une lecture attentive de ces statistiques montre qu’en février 2021, le nombre de touristes était de 1 229 et de 311 en mars de la même année. Pour les périodes correspondantes l’année dernière, les arrivées étaient respectivement de 111 560 et 55 863. Dans la foulée, on relève que de ces 2 830 touristes, qui ont foulé le sol durant les quatre premiers mois de 2021, quelque 2 706 se sont déplacés par voie aérienne et venaient essentiellement de l’Europe. Même tendance l’année dernière pour la période correspondante : 275 428 touristes par des vols aériens, dont 205 687 venant principalement des pays européens.