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Hotel Europa: «Éna lamor ladan!»

20 mai 2018, 21:30

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Hotel Europa: «Éna lamor ladan!»

La nuit tombe du côté de la ville lumière. Il est 20 heures, les ombres des quelques rares passants se laissent éclairer par les phares des voitures. L’atmosphère est lugubre, les sens sont en éveil. L’air est glacial, de quoi avoir froid dans le dos…

Dans la pénombre curepipienne se dresse une silhouette. Celle de l’hôtel Europa, qui tombe en ruine. Il devait être démoli en 2013, a pris feu en 2017. Triste destin que celui de cette bâtisse jadis «célèbre», que fréquentaient de nombreux clients mauriciens.

À quelques pas, un homme âgé d’une quarantaine d’années et son ami. Ils sont en pleine conversation, à côté d’une pharmacie. François n’hésite pas à nous parler, il ne semble pas être dans son état normal. «Ou pansé ou kapav zwenn ek sa bann dimounn-la ek koz ar zot? Sel konsey ki mo donn ou, sé alé dépi la, pou ou prop sékirité…» Le ton est donné.

François explique que l’hôtel Europa est devenu un repaire de bandits, hanté la nuit par des malfrats, des «criminels», des drogués. Un lieu devenu «infréquentable», selon la quadragénaire, à tel point que même les SDF du coin ont fui les lieux. «Zot finn préfer al Porlwi, isi tro danzéré… Mo finn dir ou pa rant laba…»

L’hôtel réserve un spectacle désolant. La porte principale est scellée, mais il existe d’autres entrées. Au rez-de-chaussée, un pan de mur a été abattu, histoire d’en créer une, justement. Au milieu des ruines du passé, des bouteilles d’alcool vides, des déchets et de vieux vêtements, pas d’âme qui vive. Il est 22 heures, retour à l’extérieur.

Sur une des marches, un téméraire. Un Malgache, venu ici pour capter le Wi-Fi, accessible grâce à la proximité d’une borne… «Li pa koné li kapav zwenn ar so lamor isi», lance un passant. Sunil habite, en fait, la rue Lees. Il est en route pour la maison, après avoir pris quelques verres. «Ki zot pé fer isi? Zot pa trouvé zot pé vinn rod lamerdman? Kouma fer nwar dimounn aret marsé par isi. Éna lamor ladan!» ne cesse-t-il de répéter.

Sunil, natif de Curepipe, raconte que sa ville n’est plus ce qu’elle était. «Népli kapav met néné déor kan fer nwar… Bann-la vinn isi ver 7er. Zot drogué ek fer zot sinéma. Zot vey partou ek lerla zot sorti, zot rod atak dimounn ki sorti casino ou bien bann ki pé al diskotek. Mo konsey zot alé dépi la!»

À la gare, Jan Palach, un gardien lance la même mise en garde. Il est alors 23 heures. Sunil, affolé, réapparaît. Les malfrats viennent de lui voler son paquet de cigarettes et Rs 300. «Dégazé alé mo dir zot bann-la pé rod zot!»

Près de la gare, deux hommes à la mine patibulaire nous attendent de pied ferme. Le ton est sans équivoque, pas la peine d’essayer de discutailler. Sous peine de finir sous la rubrique faits divers…  

Impossible de démolir l’hôtel

<p>Lors de la réunion du conseil municipal du 30 avril, le maire Hans Marguerite s&rsquo;est plaint des ivrognes et des drogués qui se baladent dans la ville à la tombée de la nuit. Qu&rsquo;attendent les autorités pour réagir ?</p>

<p>Le problème c&rsquo;est que l&rsquo;hôtel Europa, ou du moins ce qu&rsquo;il en reste, ne peut être démoli car les héritiers sont toujours vivants. <em>&laquo;C&rsquo;est dommage que nous n&rsquo;ayons pas l&rsquo;adresse de ces personnes. Nous avons recherché un avis légal et les procédures sont en cours&raquo;,</em> affirme Hans Marguerite.</p>

<p>En attendant, évitez de vous&nbsp; aventurer dans le coin le soir&hellip;</p>