Publicité

Une proposition décente

23 octobre 2016, 07:45

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Nous ne le réalisons peut-être pas mais nous vivons un chapitre important de notre histoire politique. La sortie de scène de sir Anerood Jugnauth n’est pas une parenthèse, ou une simple page que l’on tourne. Elle marque un tournant majeur dont les implications sont et seront nombreuses et non négligeables sur les années à venir.

L’autre vieux routier de la politique locale, Paul Bérenger, a saisi l’importance, pour notre image démocratique, de bien gérer cette situation «inévitable» à la tête du pays.

Pourquoi «inévitable» d’ailleurs – terme balancé par SAJ lui-même ? Serait-ce dû à une santé qui se fragilise au point où le PM réalise, de plus en plus, que malgré toute sa ténacité et le soutien de quelques inconditionnels, il ne pourra pas aller jusqu’au bout ? Serait-ce dû à l’impatience de son dauphin qui a entamé un pèlerinage à travers le pays ? En l’absence d’une Freedom of Information, on ne peut que supposer.

En adoptant ce ton «solennel» hier, face à la presse, Bérenger a voulu troquer son habit d’opposant politique pour celui d’un «vrai patriote». Son appel à SAJ pour qu’il procède à la dissolution de l’Assemblée nationale avant de quitter la scène permettrait, selon le leader du MMM, au Premier ministre de «sortir par la grande porte.»

Le raisonnement – qui est d’ordre moral (pas d’ordre légal) - est le suivant : puisque SAJ n’avait pas prévu de quitter la scène avant 2019 (du moins il ne l’a jamais dit publiquement), il n’a donc aucunement fait allusion à son remplacement éventuel par son fils durant la campagne de 2014. Par respect donc pour l’électorat qui a voté pour son Prime ministership, il serait sage de sa part de retourner le vote à l’électorat – qui aura alors le loisir de plébisciter – ou pas – son fils Pravind, quand ce dernier se présentera comme PM.

Certes, cette éventualité ne sera pas au goût de ceux qui poussent SAJ vers la sortie – dont ses (jadis) plus fidèles lieutenants, Showkutally Soodhun et Nando Bodha, qui semblent avoir compris que leur avenir réside aujourd’hui entre les mains du fils – le fossoyeur sans peur de Heritage City.

En parlant d’Heritage City, que plusieurs MSM (y compris Soodhun aujourd’hui) mettent aujourd’hui sur le compte de l’inexpérience de Roshi Bhadain (et/ou de son conseiller), il est intéressant de noter que Monsieur Bonne Gouvernance n’a pas tardé à communiquer, hier, qu’il n’a strictement rien à voir avec le «fiasco» Omega Ark – un dossier piloté par le ministère des Finances de Pravind Jugnauth.

C’est entre les scandales lor scandales, qui jalonnent le parcours, jusqu’ici chaotique, de Lepep – à se demander sérieusement si ce n’est pas le plus faible gouvernement de l’ile Maurice post-indépendance -, au sein d’une alliance Lepep divisée entre camps qui s’affrontent en permanence, et un MSM qui specule sur les nominations ministérielles, que vient la proposition, somme toute décente, de Paul Bérenger à SAJ.

Suite à cette proposition, il y a, au moins, deux possibilités.

  1. Il l’accepte. Si SAJ se sent acculé par Pravind Jugnauth et ses chihuahuas, il lui reste ce joker : dissoudre, en effet, le Parlement et le pays retourne aux urnes. Et si son fils, qui dit ne pas penser au fauteuil suprême, est intéressé par le job, il pourra alors faire acte de candidature – et affronter l’électorat – en toute transparence.
  2. Il fait la sourde oreille. Si SAJ voulait secrètement et de tous temps que son fils le remplace, et qu’il a su cacher ce détail majeur à l’électorat, alors il continuera à faire la sourde oreille. Et la rue pourra gronder autant qu’elle le souhaite, il n’entendra rien. Ce faisant, il aura trahi l’électorat, mais dira qu’il respecte la Constitution.

Et si son père risque de rater sa sortie, Pravind Jugnauth rentrera, lui, dans l’histoire par une partie de la porte – soit l’imposte : il deviendra le premier PM du pays à ne pas avoir reçu la bénédiction de l’électorat. Et quand un jour il aura à affronter celui-ci pour de bon, il ne pourra plus se réfugier ni derrière son père, ni derrière la Constitution...