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Centrale de St-Louis: pourquoi les habitants disent NON

30 juin 2016, 20:00

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Centrale de St-Louis: pourquoi les habitants disent NON

La centrale de St-Louis n’en finit pas de faire parler d’elle. Après le branle-bas de combat avant de conclure le contrat avec la firme danoise Burmeister & Wain Scandinavian Contractor, fournisseur des nouveaux moteurs, le Central Electricity Board (CEB) se retrouve cette fois-ci face à des habitants de Camp-Chapelon et de Plaine-Lauzun, mécontents et déterminés à faire capoter son projet à St-Louis. Ces résidants, dont le combat ne date pas d’hier, disent souhaiter une délocalisation de l’usine loin des habitations. Ils réclament donc une injonction de la cour. L’affaire sera appelée le 8 juillet. Pourquoi s’élèvent-ils contre ce développement énergétique visant à remplacer des moteurs polluants vieux de 38 ans ? «L’express» est allé à leur rencontre dimanche.

 

Chez les Permessur, les murs sont craquelés.

À la rue Philippe Rousset, à Camp-Chapelon, à l’arrière de la centrale de St-Louis, les Permessur nous conduisent à l’intérieur de leur maison. Le chef de famille, Fazle, nous montre des craquelures sur les murs à l’extérieur comme à l’intérieur de la maison, à l’instar d’une chambre à coucher. «Ou tapé li tonbé. Boukou plas inn bousé la, inn krépi. Kan ou asizé, kouma dir aster li pou tonb lor ou. Aswar kan sa bann moter-la an mars, krim sa. Bann vit-la vibré», relate-t-il.

 

Momine Engapen : «Mes fenêtre tremblent à chaque vibration».

Momine Engapen, gérante d’une tabagie située en bordure de l’autoroute à Plaine-Lauzun, raconte que sa famille, dont ses deux fils de 15 et 20 ans, souffre de maux de gorge et de problèmes respiratoires. Installée sur place depuis 20 ans, elle affirme que ses fenêtres tremblent à chaque vibration de la centrale.

 

Farade Nunnoo : «Nous sommes pour le développement propre».

Cet homme d’affaires de Plaine-Lauzun, ancien conseiller du village de Surinam, est à la tête du Mouvement civique de l’endroit. Farade Nunnoo, dont le business et la résidence font face à la centrale de l’autre côté de l’autoroute, fait valoir que les habitants ne sont pas contre le développement.

«Nous sommes pour le développement propre.» Son combat est simple : «Que le CEB freine l’utilisation de ses moteurs Pielstick vieux de 38 ans et que les nouveaux, qu’il compte installer, répondent aux normes. Au cas contraire, qu’il délocalise la centrale ! Nous ne sommes pas d’accord que le CEB brûle 200 000 tonnes d’huile lourde ici au lieu de se tourner vers les énergies renouvelables.»

N’est-ce pas une compensation que les habitants réclament ? «Dans un second temps, oui», admet Farade Nunnoo. «Le CEB ne peut opérer ses machines de 6 heures à minuit, voire plus au détriment de la santé des habitants. En 2009, un rapport commandité par le CEB a évalué à Rs 750 000 la compensation par habitant concerné. Compensation que les habitants n’ont jamais reçue, hormis des pots de peinture à quelques personnes triées sur le volet», soutient-il. Et d’ajouter qu’à ses frais, il demandera à des ingénieurs et médecins de faire une nouvelle évaluation et un examen médical des personnes malades avant de chiffrer le montant des dommages.

 

Farad Ellahebokus: «Sans médicaments le soir, je ne peux dormir».

Farad Ellahebokus, 44 ans, confie que sans médicaments le soir, il ne peut dormir. Le comité Fakim, institué en 2009 pour mener une enquête sur les impacts environnementaux, avait pris son cas en exemple. Cet habitant s’était officiellement plaint des fissures dans sa maison en raison des vibrations lorsque la centrale est opérationnelle. Mais aussi de pollution sonore au-delà des 60 décibels permis dans une zone résidentielle et, pour finir, de pollution de l’air avec la fumée qui s’échappe et des dépôts de suie sur sa terrasse.

Sept ans après, la situation a empiré, confie Farad Ellahebokus. «Au lieu de prendre mes plaintes en considération, ce sont d’autres habitants qui ont été compensés avec des pots de peinture. Le CEB a ensuite pris contact avec moi pour me dire que tout est finalisé et qu’il n’y a plus de problème à Camp-Chapelon. Ça m’a découragé.» Il nous montre les fissures dans sa maison qui ont eu le dessus sur ses carreaux céramiques.

 

Nazma Balgobin : «La fumée, le bruit... Tout nous importune».


 «Dès que je respire cette affaire que le CEB brûle ici, je dois me rendre à l’hôpital», soutient Nazma Balgobin, 62 ans. «J’avais 37 ans quand j’ai commencé à être malade», indique notre interlocutrice, précisant qu’elle n’est pas la seule qui souffre. «Les enfants, comme ceux de Nazeer Ghoora, âgés de dix et huit ans, sont aussi affectés.» D’ailleurs, au moment du reportage, les parents les conduisaient à l’hôpital pour des soins en raison de troubles respiratoires.

«Mo ti bout baba (NdlR : son petit-enfant) souffre lui aussi de problèmes respiratoires. La fumée, le bruit… tout nous importune», fait valoir celle qui souhaite vivre dans un endroit propre et non pollué.

Les conclusions du comité fakim en 2009

<p>Hassen Fakim, qui avait présidé le comité d&rsquo;enquête sur les impacts environnementaux de la centrale de St-Louis sur les habitants en 2009, a conclu son rapport en cinq points. D&rsquo;abord, et surtout, que les moteurs Pielstick 1 à 4 ne soient activés qu&rsquo;en cas d&rsquo;urgence uniquement après avoir eu recours aux turbines à gaz de Nicolay. Et d&rsquo;établir une date limite pour les projets prévus et qui n&rsquo;ont pas encore été réalisés pour assurer une sécurité en matière d&rsquo;approvisionnement en électricité tout comme le retrait dans les temps des moteurs Pielstick. Ensuite, que le CEB recrute un expert indépendant pour évaluer les causes possibles des craquelures des maisons concernées à proximité de la centrale de St-Louis, engage des consultations avec les habitants de la rue Philippe Rousset et leur propose la construction d&rsquo;un mur de 10 mètres au sud-ouest de la centrale pour atténuer le bruit des moteurs Pielstick.</p>