Publicité

L’obligation de respecter la justice

24 novembre 2015, 07:37

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

L’obligation de respecter la justice

Il y a là une contradiction fondamentale. Ceux qui insistent pour que la justice ne soit pas minée par les considérations politiques ne peuvent eux-mêmes mobiliser des ressources politiciennes pour faire pression quand une affaire est entre les mains de la justice.

C’est ce que les dirigeants travaillistes ont fait hier. Ils ont marqué une forte présence au tribunal à la suite de l’inculpation provisoire de Shakeel Mohamed. Celui-ci est accusé d’un délit de droit commun, pas d’un délit politique. Pourtant, l’ancien Premier ministre et son état major presque au complet, accompagnés de partisans rouges, étaient présents à la New Court House, hier.

En jouant sur des leviers politiques, alors qu’un processus juridique est engagé, les dirigeants du PTr portent atteinte à l’intégrité du judiciaire. C’est un jeu dangereux.

Des commentaires tendancieux ont été faits. Navin Ramgoolam trouve que Maurice n’est plus un État de droit, Arvin Boolell parle de dérive totalitaire et Patrick Assirvaden soutient que le but ultime est «de finir le PTr». Ces postures peuvent troubler la sérénité de la justice. En fait, si l’affaire Gorah Issac ressurgit  19 ans après les faits, c’est parce que Swaleha Joomun, la  veuve d’une des victimes, Babal Joomun, a porté plainte à la police le 9 novembre dernier. Elle a fourni de nouveaux indices sur la fusillade. Elle demande la réouverture de l’enquête pour que justice et vérité soient faites.

Les dirigeants du PTr pensent qu’ils sont victimes d’un acharnement politique. C’est leur droit. Au vu d’un certain excès de zèle de la police, on peut penser que cette thèse de persécution politique est fondée. Mais cela n’autorise pas les opposants à se laisser aller à des comportements irrespectueux envers la justice.

D’ailleurs quand la magistrate annonce sa décision hier soir d’accorder la liberté conditionnelle à Shakeel Mohamed en dépit de l’objection de la police, la preuve de l’efficacité de nos «checks and balances» est faite. «The court is not ready to deprive the accused of his freedom at large», a statué la magistrate.

Certes, depuis toujours, le «zèle» de la police a été un élément perturbant de notre démocratie. Nous avons connu, sous divers Premiers ministres, y compris Anerood Jugnauth, des pouvoirs conduits par un désir de vengeance. Mais même quand la police s’est montrée prête à satisfaire aux exigences du pouvoir politique, le judiciaire a fait preuve d’une impartialité exemplaire.

Les politiciens doivent se retenir avant de dénigrer l’État de droit et s’en prendre au système de justice. Un politicien qui n’a pas compris la nécessité du respect de la justice est lui-même un danger pour la démocratie.