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Un noeud et quelques confettis

30 juillet 2016, 08:09

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Le nœud de cravate était parfait ! Je soupçonne qu’elle a été nouée par son épouse, Kobita. Si seulement la lecture du discours du Budget avait pu être aussi élégante, ou aussi bien faite que sa stratégie de com de la veille !

Du point de vue présentation, on peut évidemment faire mieux et le ministre des Finances ne joue pas de chance puisqu’il discourt tout juste après les conventions républicaines et démocrates, aux États-Unis, où la qualité des présentations, la force des images et le talent d’orateur (je ne parle pas ici du contenu), d’Obama aux Clinton, de Biden à Trump, sont à un niveau nettement supérieur. Dans la litanie des mesures égrenées, il est plus difficile, il est vrai, d’enflammer son public. Mais pourquoi donc insiste-t-on sur un discours de Budget de deux heures, surtout s’il sera monocorde et truffé de confettis trop souvent anodins ?

Je l’avoue : ma capacité de me concentrer aussi longtemps a sérieusement été mise à l’épreuve et j’ai même fermé les yeux deux fois pour tenter de retrouver mon jus....

Contrairement  aux discours aux conventions américaines, le contenu du texte de Pravind Jugnauth avait le mérite d’être plus concret. C’est l’essentiel. Mais est-ce suffisant ?

L’architecture de ce Budget repose, nous dit-on, sur 10 stratégies clés. La première, celle qui doit créer une vague de nouveaux entrepreneurs, se concentre surtout sur les SMEs et m’aura laissé sur ma faim. La deuxième (Jobs for All) prévoit 21 400 emplois, ce qui serait un accomplissement sérieux si réalisé mais qui, au-delà des 7 200 postes de la fonction publique, compte sur 7 000 «autres» emplois, que l’on présume dépendre du secteur privé et qui restent bien flous au vu des emplois créés depuis décembre 2014.

Au niveau de nouveaux «cycles» économiques, une «near shore refinery», modulaire, associée à du «bunkering» à terre, retient l’attention bien plus qu’une manufacture de bicyclettes et de motos. Un scheme pour subventionner, pendant deux ans, à un taux de 40 %, les exportations sur l’Europe, grâce à Air Mauritius, paraît prometteur, mais est-il correctement balisé ? Il y a des mesures pour le Freeport (les détails sont dans une Annexe), le «sheltered farming» sera soutenu, mais le «bio farming» est ramené à de plus juste proportions dans la région de Britannia (quelle est l’attente avant de purger les terres suffisamment ?). Un nouveau laboratoire pour tester les pesticides dans les cultures vivrières et une déclaration d’intention sur des limites imposées sur l’usage des produits chimiques interpelle. L’économie bleue semble piétiner, l’économie verte a quelques bonnes idées (voitures hybrides moins taxées, voitures électriques exemptes de taxe à l’importation, batteries de stockage exemptes de TVA et de droit de douane, 10 000 toits mis à contribution pour du solaire).

La quatrième stratégie ajoutera 250 spots WiFi gratuits de plus (soit 600 au total), sanctionne un troisième câble sous-marin desservant le pays et annonce, jusqu’en décembre 2019, la finalisation du projet «Fiber to home». C’est plutôt prometteur digitalement si cela se concrétise ! Le désir de réduire les contraintes bureaucratiques est bienvenu, mais l’an dernier on annonçait l’annulation de 70 permis et licences et l’on n’en a plus entendu parler ... Que les non citoyens enregistrés à la BOI pourront désormais acheter de l’immobilier, sans passer par le «Non Citizen Property Restriction Act», va réjouir certains et compte parmi les mesures courageuses d’ouverture. Parmi les autres annonces : le Metro Express (le métro léger de Bachoo rechauffé), bien évidemment, les Rs 3,4 milliards pour l’eau (c’était Rs 20 milliards sur huit ans selon Vishnu), les cours de justice rénovées, +12% à la Santé, + 11% à l’Éducation, les premières mesures du Marshall Plan et… un grand silence sur Dubaï Ports. On semble avoir projeté sans eux ?

Au niveau fiscal, Pravind  Jugnauth ponctionne encore le tabac et l’alcool, avec raison ! Grâce aux Rs 12,7 milliards reçues en don de l’Inde, sur quatre ans, le déficit budgétaire est projeté à 3,3 %. Un miracle ! Mais il compte sur une croissance de 4,1% et il faut que l’investissement soit au rendez-vous ! Ce n’est pas gagné d’avance… Si seulement c’était aussi facile que les nœuds de cravate.