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Le budget, et alors ?

27 juillet 2016, 09:14

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Ça y est ! Le grand oral du ministre des Finances aura lieu le 29 juillet. La présentation du budget de l’État. Par extension, notre budget à nous tous, Mauriciens. Car n’est-ce-pas un de nos représentants au Parlement qui aura la responsabilité de ce budget ? Et de ses retombées. Les politiques oublient souvent qu’ils sont au Parlement parce que nous avons bien voulu les y envoyer. Pour défendre nos intérêts. Pas les leurs. C’est toujours bon de le rappeler.

Alors ce budget, que représente-t-il vraiment ? Passera-t-il, comme les précédents, par-dessus la tête de la plupart des Mauriciens, qui n’y entendent goutte ? Car, même traduit en créole, il demeure que la technicité du budget de l’État n’est maîtrisée que par une infime partie de la population. Le reste ? Ils s’en soucient comme de leurs premières chaussures : en affichant une quasi-indifférence. Comment s’y intéresser en effet quand l’on peine à gérer son propre budget personnel ou familial, en plus des tracasseries du quotidien ?

Je suis institutrice. Mais j’aurais pu être policière, infirmière, ou toute autre fonctionnaire. J’ai 42 ans, deux enfants, un mari parti voir ailleurs et Rs 31 000 comme salaire mensuel. Cela peut paraître énorme comme salaire. Mais quand je retire l’argent du loyer, des services essentiels, des provisions, des leçons particulières, de la sortie mensuelle avec mes enfants et d’autres dépenses imprévues, il ne me reste presque rien. Pourtant, je fais un métier valorisant ; mais hélas pas reconnu à sa juste mesure. Alors, budget de l’État ? Pas ma tasse de thé. J’ai mes soucis à gérer. Cela me suffit.

J’ai 47 ans. Suis cadre moyen dans une entreprise du privé. Ma femme et moi nous avons chacun une voiture. Notre fils va à l’université. Notre salaire cumulé dépasse les Rs 90 000 par mois. De quoi me plaindrai-je ? Hélas, les gens ne savent pas que nous sommes endettés jusqu’au cou. Nous devons rembourser les emprunts sur les voitures, la maison, le terrain, les études de notre enfant, et aussi faire provision pour nos dépenses usuelles. Résultat : nous galérons nuit et jour pour garder le rythme. Le budget ? Très peu pour moi. Sûrement les gens comme moi vont encore casquer, en termes de taxes et d’autres charges qui viendront alourdir un peu plus notre fardeau.

J’ai 23 ans. Suis diplômé chômeur. Trois ans d’études, un an de formation professionnelle. Et un an à poireauter à la maison, à faire des milliers de demandes d’emplois. J’exagère, mais à peine. Je sens mes parents au bord du ras-le-bol. Ils se sont saignés pour moi. Mais pas de boulot. Je pensais aller travailler dans un call center, à Rs 8 000 par mois. Mais on me dit surqualifié pour le job. J’ai le moral à zéro. Budget ? S’ils annoncent des emplois pour les jeunes comme moi, oui. Mais je n’y crois plus. Cela fera deux ans bientôt qu’ils nous vendent du rêve…

J’ai 72 ans, ma femme 65 ans. Je suis un ancien laboureur. Je touche une petite pension plus, avec ma femme, notre pension de personnes âgées. Nous vivons seuls, nos trois enfants ont déjà leurs propres soucis à essayer de faire vivre leurs familles. Je ne vous raconte pas nos ennuis de santé, les visites chez les médecins, à la pharmacie. Nous vivons frugalement, sans excès. À la fin du mois, le compte en banque est presque vide. Le budget, dites-vous ? Si le gouvernement augmente notre pension, passe encore. Mais j’ai passé l’âge de croire au Père Noël.

Ces gens peuvent très bien être des connaissances à vous. Ce sont les préoccupations quotidiennes pour beaucoup d’entre nous. Qui auront sûrement d’autres chats à fouetter vendredi prochain. Mais, malheureusement, ce qui sera dis dans ce discours du budget va impacter sur la vie de tout le monde. Les riches comme les pauvres. Et le lendemain, il ne faudra pas s’attendre à mieux. Car les smart cities et autres infrastructures publiques ne vont pas remplir les ventres vides et mettre un toit sur la tête des démunis…