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De l?horrible au sublime?

8 janvier 2007, 00:00

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?Que chaque maison, bicoque, ou ruine de construction soit un centre d?éducation.?

Nelson Mandela

Partout dans le monde, chaque année nouvelle arrive avec son lot d?espoirs retapés à neuf, de bonnes résolutions à réaffirmer, de mauvaises situations à rétablir etc. etc.? C?est ainsi depuis que la notion du temps nous est apparue comme une évidence. Va donc !? Mais la réalité demeure telle qu?en elle-même la circonstance ou les circonstances les ordonnent?

Juste une heure avant le premier janvier 2007, nous raconte la journaliste Janine du Plessis, dans la livraison du 3 janvier 2007 du quotidien Pretoria News, Brent Leslie Hiscock, un jeune homme de 23 ans, plein d?entrain, aimant la vie, a été froidement abattu d?une balle de pistolet.

Au dire de sa mère Barbara Hiscock, heureuse de savoir que son fils ne sortirait pas cette nuit-là : ?Il nous avait préparé un merveilleux repas, puis il est sorti dans la cour. On avait allumé un feu et nous attendions la Nouvelle Année en prenant une coupe de champagne.?? Il était en compagnie de son frère et de sa belle-s?ur. C?est à ce moment-là que deux inconnus ont fait irruption. L?un d?eux armé d?un pistolet. Les suspects ont demandé aux hommes de rentrer à l?intérieur de la maison. Sur le pas de la porte, Brent a hésité : l?assaillant lui a tiré une balle le tuant sur place. Avec son complice ils ont tous deux pris la fuite sans rien emporter? Notre journaliste, dans son récit du drame, souligne les sordides détails de l?endroit souvent exposé à des attaques du même tonneau et de la carence de la police : une année auparavant, on avait tiré cinq fois sur le propriétaire d?un même magasin?

Loin de moi un quelconque appétit du sordide en vous exposant une actualité triste à pleurer, mais elle colle bien avec le tragique de la situation d?un pays tout juste sorti de l?apartheid pour s?enfoncer, jour après jour, dans une violence proche de la barbarie. L?Afrique du Sud post Mandela ne mérite en rien une telle malédiction. L?occasion me sera sûrement donnée de vous informer plus largement sur le sujet, dont le meurtre du jeune Brent, pour déjà désolant et révoltant qu?il est, n?est hélas ! qu?une pincée de l?immense amer qui empoisonne tout un pays, par ailleurs d?une rare beauté et aux ressources difficiles à quantifier?

Comme je l?ai souligné dans une interview commandée par l?hebdomadaire Mail & Guardian de Johannesbourg, quelques jours après mon arrivée en 1974, au pays de Desmond Tutu, d?Ahmed Kathrada, de Myriam Makeba, de Nadine Gordimer, de Antjie Krog, d?André Brink, de Breyten Bretenbach? pour ne citer que ceux-là parmi une foule d?autres?, j?ai dit : ?If South Africa fails, Africa fails? and if Africa fails, the world fails !?. Aujourd?hui encore, j?en demeure persuadé?

C?est que l?espoir est plus fort que le malheur. Il surgit sous les traits d?étonnants merveilleux personnages. Nelson Mandela certes, mais une lignée d?autres ouvrières et ouvriers du bonheur. Ce jour, je n?en citerai qu?une, parce que l?actualité de cette aube de 2007 le commande. Et surtout et par-dessus tout, parce qu?elle le mérite infiniment. Il s?agit de Oprah Winfrey, Oprah pour des millions de fervents enthousiastes et de non moins fervents admirateurs de par le monde. J?écrirai des paragraphes et des paragraphes (et je ne serai pas le seul) en honneur de cette grande dame, aujourd?hui partout unanimement saluée. Mais je dois faire court, pour laisser large place et ample espace à la photo souvenir qui illustre l?événement qu?est l?exceptionnel cadeau d?Oprah fait, après sélection selon mérite, à 152 étudiantes de 11 à 13 ans venues de familles pauvres de divers endroits de toute l?Afrique du Sud. Oprah ? elle-même ayant connu une enfance exposée à mille difficultés et à la misère ? est aujourd?hui milliardaire grâce à de longues années de travail à la télévision où son génie et son talent ont tout bouleversé pour connaître des sommets jamais atteints avant elle dans le domaine des Talk Shows? Oprah, en respect d?une promesse solennelle faite six années de cela à Nelson Mandela, qu?elle vénère, a, le lendemain du Nouvel An, dans une atmosphère de fête et d?émotion, inauguré une école de filles composée de 28 bâtiments répartis sur 21 hectares, d?un coût de 280 millions de Rands sud-africains. Une institution qu?elle a en personne entièrement financée à travers la Fondation Winfrey. En la presque timide présence de l?ex-prisonnier de Robben Island, profondément touché par un geste d?une telle générosité, d?un certain nombre de célébrités internationales dont les chanteuses Tina Turner et Mariah Carey, l?acteur Sydney Poitier, la Kenyane Prix Nobel de la Paix Wangan Maathai et la musicienne américaine India Ane (voir les photos AP et Reuters), Oprah, les yeux mouillés au moment de couper le ruban inaugural, a prononcé ces mots simples et tellement vrais : ?J?ai attendu ce jour pendant ces six dernières années? C?est le jour le plus fier, le plus grand de ma vie. Quand vous donnez de l?éducation à une fille, vous commencez à changer la face d?une nation.?

En effet, des gestes de la valeur de celui d?Oprah Winfrey contribuent grandement à changer l?horrible pour le sublime ici, là-bas et partout dans le monde?

Pretoria, le 04.01.2007 Edouard J. MAUNICK