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Christine Marot: «Des comités sont institués régulièrement pour évaluer l’avancement et la qualité des travaux à Azuri»

22 juin 2016, 13:15

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Christine Marot: «Des comités sont institués régulièrement pour évaluer l’avancement et la qualité des travaux à Azuri»

Bluelife, pôle immobilier du groupe GML, a essuyé bon nombre de critiques liées à la livraison de certains ouvrages de mauvaise qualité. Christine Marot, Chief Executive Officer, expose les mesures prises pour remédier à la situation et salue l’initiative du gouvernement visant à combler un vide juridique dans le secteur de la construction.

Le gouvernement compte introduire une législation pour réglementer les activités du secteur de la construction. Il s’agit d’un projet de loi, le «Construction Contract Special Provisions Bill». Quelle est votre appréciation de cette démarche?

Les projets immobiliers nécessitent la coordination d’un grand nombre de professionnels, le respect des diverses réglementations locales et impliquent souvent des questions techniques ou de conception. De plus, il y a tout l’aspect relatif au financement, à la réalisation, aux modifications requises par les clients et la question fondamentale du respect des délais. C’est donc un secteur extrêmement complexe qui mérite d’être proprement réglementé et où les litiges doivent être résolus efficacement.

Le droit de la construction est un domaine particulier dans lequel les litiges sont liés à la construction elle-même, à l’ingénierie et aux infrastructures. Ces cas sont vraiment différents des litiges commerciaux. Une réglementation dans ce secteur est bienvenue mais il faudra s’assurer que tout organe d’arbitrage soit doté de toutes les compétences et de l’indépendance requise pour traiter les dossiers qui lui seront soumis.

Revenons à Azuri, un projet immobilier de luxe réalisé par Bluelife, le pôle immobilier de GML. Une des sociétés de construction engagées dans la réalisation de ce projet a connu un accident de parcours qui a débouché, entre autres, sur la livraison de certains ouvrages de mauvaise qualité. Avez-vous réalisé un audit pour situer les causes?

Cet accident de parcours, je pense, fait allusion à la décision prise par BlueLife Ltd en février par rapport à la construction de la phase 2 des résidences locales à Azuri. Nous avons mis fin au contrat qui nous liait à la société Super Construction. Cette décision, qui a été difficile à prendre, avait été mûrement réfléchie. Elle a été prise dans l’intérêt de nos futurs propriétaires en raison de manquements au contrat de construction avec ladite société. Nous avons, depuis, fait appel à un nouvel entrepreneur. Celui-ci a repris très rapidement les travaux. Ce qui nous permet de poursuivre, avec un léger délai, la finition de ce projet. Nous avons d’ailleurs déjà livré des résidences à certains propriétaires qui nous ont exprimé leur grande satisfaction quant à la qualité de construction et de finition de leur bien.

Qu’en est-il de la livraison des ouvrages qui étaient de mauvaise qualité?

Nous avons effectivement eu des problèmes de qualité au moment de la livraison de certaines unités. Pour y remédier, un audit a été réalisé par un professionnel. L’objectif a été de tirer les bonnes leçons tant au niveau de manquements à certains engagements, qu’à la gestion budgétaire ainsi qu’à celui de la livraison laborieuse à certains propriétaires.

En ce qui concerne la livraison de certains ouvrages de mauvaise qualité, il est bon de souligner que dans tout projet immobilier à Maurice comme à l’étranger, la satisfaction générale est rarement atteinte en raison de la très grande sensibilité que tout acheteur attache à un investissement immobilier. Lors de l’achat sur plan en VEFA (NdlR, vente en l’état futur d’achèvement), comme c’est le cas à Azuri, l’acheteur place de grandes espérances dans l’idée conceptuelle qu’il se fait du bien, particulièrement lorsqu’il s’agit de sa future maison.

Cette Phase 1 d’Azuri a été un projet ambitieux tant dans son concept que dans sa réalisation simultanée des résidences, de l’hôtel et de toute l’infrastructure qui va avec. Dans l’ensemble, nous pensons avoir réussi à créer à Azuri un village accueillant et animé, où se mêlent des personnes d’horizons différents, une véritable exception sur l’île. À ce jour, nous avons une majorité de propriétaires heureux.

Le fait que certains rachètent de nouvelles unités ou qu’ils aient revendu avec des plus-values importantes démontre, selon moi, la satisfaction de l’acheteur initial et certainement pas un sentiment aussi catastrophique que certains souhaitent le faire croire.

Quels sont les enseignements que vous avez tirés de cette expérience malheureuse?

La livraison de la Phase 1 d’Azuri, quoique laborieuse dans certains cas, n’est pas à mon sens une expérience «malheureuse». C’est une expérience tout court. L’introspection et la remise en question de cette expérience ont permis de tirer des leçons apprises à différents niveaux, notamment la nécessité de ne pas être trop ambitieux en ce qui concerne le temps requis pour la réalisation d’un projet immobilier.

En ce qui concerne les coûts, ils doivent être proprement estimés et gérés par un reporting pointu. Quant au contrôle qualité, il doit se faire tout au long de la construction. Le temps nécessaire doit y être consacré pour livrer au client un produit correctement fini. Autre enseignement que nous avons retenu, et qui de notre avis est primordial, concerne la nécessité de garder le flux de communication entre le promoteur et l’acquéreur, ouvert tout au long du processus.

Quelles sont les mesures qui ont été prises pour que ce genre de situation ne se reproduise pas?

À la suite de l’audit effectué par des professionnels, l’équipe managériale a revu ses process et son mode de fonctionnement. Ce qui devrait nous permettre d’assurer un contrôle à tous les niveaux. Une culture reposant sur la rigueur, la qualité, le professionnalisme et l’autocontrôle est insufflée à tous les niveaux de l’entreprise. Ce sont du reste les enseignements retenus de l’analyse de ce qui a fonctionné et de ce qui ne l’a pas été sur la Phase 1 qui nous a permis de réagir à temps pour mitiger l’impact de la résiliation du contrat de construction des 114 résidences pour la clientèle locale.

En analysant la nature des plaintes de certains des investisseurs, on devine chez eux le sentiment d’avoir été floués. Qu’est-ce que vous avez fait pour que cet accident de parcours n’entache pas la réputation de Maurice en tant que pays destinataire de projet d’investissements directs étrangers?

Nous avons mis et continuons de tout mettre en œuvre pour remédier à ce qui doit l’être, si tant est que les demandes sont jugées raisonnables. Si un propriétaire se considère lésé – et que le promoteur n’a pas honoré ses promesses –, il peut avoir recours à une cour de justice.

La frustration ne procure toutefois pas à un propriétaire le droit d’émettre des allégations infondées ou fausses dans les médias, voire de tenir des propos diffamatoires en vue de nuire à la réputation d’un promoteur.

Il est aussi regrettable de constater que lors de revendications aussi virulentes de la part d’une minorité de propriétaires, le promoteur n’ait pas été invité à commenter les propos ou à préciser le contexte de certains éléments avancés.

Un droit de parole à la partie incriminée est légitime. Ces actes sont préjudiciables à notre entreprise et à l’île Maurice comme destination, de sorte que nous avons enclenché les mesures juridiques nécessaires pour réprimer de telles pratiques qui nuisent illégalement à notre réputation.

Pour avoir plus de crédibilité auprès des clients et du monde des affaires en général, les opérations de suivi et d’évaluation de mesures correctives prises ne devraient-elles pas être confiées à une société de consultance ou d’audit qui n’a aucun intérêt, de quelque nature que ce soit, avec le groupe dont BlueLife fait partie?

Nous avions déjà fait réaliser un audit par un professionnel reconnu il y a plusieurs mois et les actions correctives ont ensuite été enclenchées. Notre équipe s’est adjoint les services d’une équipe constituée de professionnels indépendants, incluant un Project Manager et un Quantity Surveyor pour évaluer et suivre l’exécution des mesures correctives de cette Phase 1.

Quels sont les critères que vous imposez à ces sociétés de construction que vous engagez dans la réalisation de vos projets immobiliers?

J’ai envie de dire «that it takes two to tango»! Une séquence de projet est requise sur un chantier, et l’inversion de certaines étapes, ou le manquement d’une étape peut aboutir à des délais et coûts additionnels. Les difficultés rencontrées au cours de la Phase 1 ont entraîné une remise en question des process qui incluent ceux liés à méthodologie appliquée pour la construction afin que les étapes soient effectuées de façon cohérente. Nous l’avons déjà mise en oeuvre. Si elle peut être jugée contraignante, par la société de construction, elle a selon nous tout son sens.

Le contrôle qualité est présent dès le départ. Ces mêmes principes ont été déployés sur une deuxième phase de nos projets et les résultats sont probants. Il y a encore à faire, notamment sur des méthodes alternatives de construction et sur l’utilisation de matériaux encore non utilisés à Maurice et qui pourraient contribuer à un produit plus fini.

C’est sans doute à travers une collaboration accrue entre les promoteurs importants et les sociétés de construction que nous pourrions tendre à apporter à Maurice des techniques plus performantes.

Comment, et à quelle fréquence, l’évaluation de leur compétence et celle de son personnel est-elle faite?

Pour chaque projet, nous évaluons sa complexité et établissons les entreprises susceptibles de les réaliser, tant en matière de construction qu’en ce qui concerne l’expertise et l’expérience des professionnels. Ce sont eux qui constitueront l’équipe qui mènera à bien le projet. Il est donc nécessaire, lors de cet exercice, d’établir la capacité de l’entreprise présélectionnée à absorber des contrats supplémentaires de même que sa capacité à fournir des professionnels reconnus pour le suivi des travaux. Des équipes totalement différentes sont du reste actuellement à l’œuvre sur les divers chantiers d’Azuri. Finalement, nous mettons en place des comités réguliers qui permettent en permanence de se consulter et d’évaluer l’avancement et la qualité des travaux tout au long du processus de construction.

D’un côté, il y a des entreprises ayant un fort potentiel pour la création de nouveaux emplois durables. De l’autre, la volonté des autorités de freiner l’intérêt national pour les projets immobiliers. Où trouver l’équilibre entre les deux?

Le projet Azuri est un cas particulier. Au-delà de la construction de résidences, c’est un véritable village que nous réalisons. Un village qui vient avec toute sa diversité; diversité de personnes, de commerces, d’activités, de services, de culture, d’innovation, etc.

Azuri a inventé une nouvelle manière, multiculturelle, de vivre au bord de l’océan Indien. Il s’agit d’une véritable audace sociale et urbanistique, développée autour de commerces et de places animées. Ce sont les leçons et les expériences des années passées qui nous ont permis de parfaire notre offre commerciale, hôtelière et immobilière, pour aujourd’hui nous perfectionner.

La vente de résidences dans le cadre des projets réalisés dans les paramètres des schémas Integrated Resorts, Real Estate et Property Development est effectivement perçue comme générant de l’investissement à l’origine sans pour autant contribuer durablement à notre économie.

Au-delà des emplois directs relatifs à la vie du village, à son offre commerciale et à la gestion de ce parc immobilier, que ce soit pour la gestion locative et la maintenance des biens, il y a l’emploi indirect lié à la construction de même qu’à tous ces services qui fonctionnent pour répondre à la demande liée à de tels développements.

Qu’en est-il des projets de développement qui ne sont pas inclus dans le cadre des «smart cities»?

Si tel est le cas, il serait dommage de ne pas promouvoir la capacité pour les propriétaires étrangers de ces résidences à faire du business et d’avoir un permis de travail. Ce sont en général des gens avec des compétences, qui ont réussi à l’étranger dans des domaines divers qui recherchent une nouvelle qualité de vie.

Leur expertise pourrait profiter à nos compatriotes et à notre économie par un apport direct à notre secteur financier (offshore, bancaire) et dans d’autres secteurs comme les technologies et l’innovation.

Il serait judicieux qu’il y ait une prise de conscience que ces acquéreurs étrangers investissant dans des projets de développement de type Integrated Resorts Scheme, Real Estate Scheme et Property Development Scheme sont tout aussi susceptibles de contribuer à notre économie que ceux faisant le choix d’habiter et/ou de travailler dans une smart city.