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Swaleha Joomun: «Toorab voulait Rs 2 M pour tout me dire...»

26 novembre 2015, 12:20

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Swaleha Joomun: «Toorab voulait Rs 2 M pour tout me dire...»

L’affaire Gorah Issac vient d’être relancée, dix-neuf ans après les faits. Swaleha Joomun, la veuve de Babal Joomun, parle, entre autres, de sa rencontre avec Toorab Bissessur…

 

 

Où avez-vous puisé la force, à l’époque, pour dénoncer un complot après l’assassinat de votre mari, Babal Joomun, en 1996?

 

Je ne me savais pas si resilient. Et puis, j’étais très jeune à l’époque. La jeunesse, c’est le courage, la santé et le moral. J’avais cet immense besoin de savoir ce qui était arrivé. Je savais que la réponse était dans la chronologie de ce qui s’est passé avant le crime prémédité. Il y avait aussi le fait de l’avoir vu sans vie à l’hôpital aux petites heures de ce samedi noir… Il me tenait au courant de ce qui se passait dans son inner circle. Je savais ce qui se passait dans son groupe. Je savais qui étaient les traîtres car la popularité fait toujours des envieux. Personne ne s’attendait qu’une femme vienne poser des questions à tous ces hommes qui luttent pour être au sommet.

 

Pourquoi avoir contracté un mariage avec Raffick Goolfee et avec Asif Polin?

 

Je pense que quiconque à ma place aurait fait la même chose, mais peut-être avec plus de discrétion. Je ne pouvais pas être discrète vu l’enjeu. Et ma réputation était le cadet de mes soucis. C’était trop facile de me coller des étiquettes. Je voulais des réponses et j’étais prête à sacrifier ma réputation de femme.

 

Les deux ont déclaré vouloir m’aider. Les deux étaient mariés mais cela ne les a pas empêchés de me considérer comme une deuxième épouse pour Raffick et la quatrième pour Asif Polin. Je n’ai pas mis un revolver à leur tempe pour qu’ils parlent. Et c’est Asif Polin lui-même qui m’a volontairement révélé le nom de son cousin, Liyyakat Polin, et la participation de ce dernier dans l’assassinat de mon mari.

 

Puis, il m’a aidée à rencontrer Toorab Bissessur. Ce dernier voulait me voir sans que je sois accompagnée de Raffick Goolfee. Ensuite, il a voulu m’aider pour que j’aie un toit sur la tête avec mes enfants. Asif Polin a même emmené Toorab Bissessur chez moi un soir, en décembre 1997. J’ai eu très peur lorsque Toorab Bissessur m’a dit qu’il était dans le 4x4 rouge des tueurs de Babal. Il voulait Rs 2 millions pour me dire qui était à ses côtés dans le véhicule. Je n’oublierai jamais cette soirée.

 

Vous êtes à la base de l’arrestation de Shakeel Mohamed pour complot dans cette affaire. Complot est un mot vague, quelles nouvelles preuves avez-vous apportées?

 

Il y a trop de zones d’ombre dans le récit de Gorah Issac, d’où, peut-être, le mot «complot». Il y a eu pillages, hold-up, trafic d’armes et de munitions, et une certaine hystérie collective avant et après l’assassinat de mon mari. Mais c’est l’amnésie totale. Certains leaders nous ont dupés en se disant en guerre contre ce terrorisme et son escadron de la mort. Ils ont voté pour la Patriot Act tout en fermant les yeux sur un gang armé. Il faut être vraiment naïf pour ne pas savoir que les mercenaires ne peuvent exister sans le soutien politique et financier de ceux qui sont au pouvoir ou dans l’ombre du pouvoir. Après la tragédie bien réelle, on a, en fait, une farce et une double farce en envoyant les chamchas en prison. La farce a continué lorsqu’on a essayé de nous faire croire que les mercenaires étaient ‘des gens bien, des Samaritains’. Que Babal a été tué dans ‘un accident’.

 

Tout le monde ne pensait qu’à remporter les prochaines élections. J’ai refusé d’être complice de cette farce. Mon mari a bel et bien été victime d’un crime crapuleux. Ils ont toutes les preuves mais font comme dans ce mythe où il ne faut pas regarder en arrière. Nous avons des fabulateurs comme ‘leaders’. Et c’est ça le complot.

 

Tous les cinq ans, on vote pour le moindre mal, on essaie de me faire taire en me donnant une version diluée du mal qui a frappé ma famille. Je croyais sincèrement que ceux qui parlaient de ‘cerveau’ iraient jusqu’au bout. J’ai attendu. Et rien ne s’est passé.

 

Pourquoi parle-t-on de crossfire en 2015 ? Où sont les preuves sur la photo du 4x4 rouge ? Et aucune source n’a parlé de l’impact des balles sur le 4x4 le 26. C’est pourquoi il est crucial de remonter le fil et nous aurons les comploteurs et les helpers.

 

Quelles étaient ces pistes non explorées ?

 

Les armes et munitions utilisées par l’escadron de la mort. Les hold-up finançaient en partie ce trafic.

 

Dans «l’express» de mardi, vous vous dites surprise de l’arrestation de Shakeel Mohamed. Est-ce à dire que, selon vos informations, il ne fait pas partie des quatre personnes «high profile » que vous avez à l’œil?

 

Je suis surprise qu’il soit le premier à être convoqué. Je ne dirai rien d’autre sur les autres personnalités. J’ai confiance en la police mais cela me trouble que l’on pense que 19 ans après, je dois passer l’éponge. On ose me critiquer pour ne pas oublier ce qui est arrivé il y a 19 ans ! Je ne demande pas grand-chose sinon une certaine cohérence et du sérieux.

 

Entre novembre 1996 et le 23 janvier 2003, j’ai frappé à toutes les portes. J’ai rencontré tous les leaders, les membres de l’escadron de la mort, des imams, des soi-disant ténors du barreau. Mais tout le monde s’est foutu de moi. On m’a humiliée, on m’a traitée de tous les noms. On a essayé de me ridiculiser sans vouloir faire la connexion entre la vérité et mon impuissance à la faire éclater. Je n’aime pas que Babal Joomun soit un motif de campagne. Ils sont si bêtes que cela mes adversaires ? C’est très rassurant, je trouve. Le public est si bête que cela, lui aussi ? Ça, c’est effrayant