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La chronique de Philippe Auclair, spécialiste du football anglais à France Football et sur RMC : Chelsea vs Tottenham, finale league cup (20h00): Mourinho douterait-il ?

1 mars 2015, 10:40

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La chronique de Philippe Auclair, spécialiste du football anglais à France Football et sur RMC : Chelsea vs Tottenham, finale league cup (20h00): Mourinho douterait-il ?
Très peu de managers ont disputé onze finales de coupe. Encore moins en ont gagné neuf dans quatre pays différents comme José Mourinho l’a fait en l’espace de huit saisons seulement...
 
Très peu de managers ont disputé onze finales de coupe. Encore moins en ont gagné neuf dans quatre pays différents comme José Mourinho l’a fait en l’espace de huit saisons seulement, de la Coupe de l’UEFA avec le FC Porto en mai 2003 (suivie de la Taça de Portugal le mois suivant) à la Copa del Rey remportée par le Real Madrid en 2011. Seuls accrocs à ce palmarès presque parfait : une Coupe du Portugal perdue contre Benfica en 2004 (le FC Porto avait sans doute la tête ailleurs, à Gelsenkirchen, où l’AS Monaco l’attendrait en finale de la Ligue des Champions dix jours plus tard) et la Coupe du Roi que le Real laissa échapper en prolongation face à l’Atletico Madrid en 2013. Autant dire que le Portuguais a le don de savoir préparer ces matches au rasoir. Autant dire que ne pas faire de Chelsea le favori de la «League Cup» de ce dimanche serait faire une insulte au sens commun, d’autant plus que les Blues auront pu se reposer tout au long de la semaine qui aura précédé ce match, tandis que Tottenham, coincé entre deux chaises, en tomba jeudi soir sur le terrain de la Fiorentina.
 
Vous aurez deviné le ‘mais’ qui s’annonce. ‘Mais’, donc, les choses sont peut-être moins simples qu’il y paraît. À lire l’entretien avec José Mourinho qu’a récemment publié le magazine américain «Sports Illustrated», l’homme que tant aiment haïr vit une seconde lune de miel avec ses Blues adorés. La «Premier League», dit-il «est un paradis pour un manager». Disons tout net que ce n’est pas exactement l’impression qu’il nous a donnée depuis un peu plus de deux mois – depuis que Tottenham, justement, fit exploser son équipe 5-3 à White Hart Lane. Peut-être que cet entretien avait été réalisé auparavant, quand Manchester City pointait encore à sept longueurs du leader ? Ce n’est pas  impossible. C’est aussi plus probable que Mourinho, soucieux de présenter une image aussi flatteuse que possible de son club aux lecteurs US (un marché qui compte, ô combien, pour Chelsea FC), a préféré arrondir les angles au point de se demander s’il en existait le moindre.
 
Le fait est que Mourinho, patelin quand il parle aux médias étrangers, s’est engagé dans une drôle de guerre avec les autorités du football anglais et les journalistes de son pays d’adoption. Il a déjà séché plusieurs conférences de presse, refusant notamment de s’adresser à qui que ce soit après le nul 1-1 contre Manchester City, prétextant que son équipe était la victime d’un complot orchestré (entre autres) par le réseau «Sky» et ses consultants-vedette, dont Jamie Redknapp et Thierry Henry. Ce complot, qui n’existe que dans l’esprit de sa cible présumée, aurait pour objet de braquer les arbitres contre Chelsea. Chaque erreur d’un officiel devient ainsi une nouvelle preuve de  l’existence d’une conspiration – l’expulsion de Matic, la non-expulsion de Barnes, les pénaltys refusés par Martin Atkinson lors d’un sulfureux Chelsea-Burnley le week-end passé, par exemple. La FA a tapé sur les doigts de José-le-râleur, ce qui a sans doute renforcé sa conviction que quelque chose se tramait contre son équipe.
 
Peut-être que l’humeur sombre du ex-«Happy One» n’est  qu’un masque de plus pour lui, qui en a déjà porté tellement, une façon toute mourinhienne de rassembler les siens autour d’un grief imaginaire. Mais peut-être qu’elle est aussi l’expression d’un début de doute, un remake du mélodrame auquel on avait assisté tout au long de sa dernière saison au Real Madrid. Chelsea n’est plus aussi dominant qu’à l’automne. Les joueurs qui avaient brillé alors, Costa et Fabregas en particulier, marquent le pas. L’indispensable Matic est suspendu pour deux matches, dont la finale de demain. La charnière Cahill-Terry inspire une certaine crainte chez ses supporters. Les Blues ont tremblé face au PSG, comme ils avaient tremblé face à Liverpool en demifinale de la «League Cup». Peut-être,
 
tout compte fait, que les deux hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives, que l’incertitude nourrit le calcul et réciproquement. Mourinho n’est plus le «pater familias» si serein du mois de novembre ; l’autorité qu’il exerce dans son clan (encore qu’on ait parlé d’une altercation qui l’aurait opposé au gardien Thibaut Courtois, et expliquerait pourquoi celui-ci s’est retrouvé sur le banc lors de la venue d’Everton à Stamford Bridge) a diminué au dehors. N’est pas Alex Ferguson qui veut.
 
Alors, oui, Chelsea est un favori logique. Oui, Mourinho a le don de savoir paufiner ses équipes pour une occasion comme une finale de «League Cup», une compétition qu’il a d’ailleurs déjà gagnée deux fois, en 2005 et 2007. Oui, Tottenham, même si Pochettino avait fait tourner ses Spurs pour leur match contre la Viola, aura un match de plus dans les jambes, et un match à l’extérieur en Europe, en plus. Mais Tottenham se souviendra aussi du 5-3 du 1er janvier, qu’ils espéreront donner le ton pour  2015. Cela est beaucoup moins improbable qu’il y paraît.