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Boris de Chazal: triathlète, trailer et libraire

11 septembre 2014, 15:37

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Boris de Chazal: triathlète, trailer et libraire

Cela fait six ans déjà que Boris de Chazal écume les sports d’endurance. Du trail au kayak de mer en passant par le triathlon et le triathlon nature, il a choisi d’être méthodique, de mettre toutes les chances de son côté et de faire les efforts nécessaires à l’entraînement pour atteindre les objectifs fixés. Rencontre avec un passionné qui est arrivé à la conclusion que la vie est trop courte pour pratiquer un seul sport.

 

Vous faites partie, avec Hugues Rivet (35-39 ans) et Rajen Rungassamy (55-59 ans), des trois Mauriciens qualifiés pour les Championnats du monde de triathlon nature XTERRA le 26 octobre à Maui. Vous connaissiez déjà le triathlon, quel est votre sentiment sur le triathlon nature ? Quelles différences y a-t-il entre ces deux spécialités ?

– Le triathlon nature, c’est que du bonheur ! Ayant le trail dans la peau, et après avoir basculé dans le triathlon – car la vie est trop courte pour pratiquer un seul sport –, j’ai enfin, grâce au triathlon XTERRA organisé par Marie Cartwright, goûté à l’extase de combiner les trois disciplines du triathlon en pleine nature. Le triathlon nature est très différent du triathlon olympique car, bien que les trois disciplines soient les mêmes – natation, vélo et course à pied –, tout diffère dans leur approche. En triathlon traditionnel, un bon nageur sera avantagé et pourra rester avec le groupe de tête en vélo, le drafting étant autorisé, et il ne lui restera plus qu’à limiter la casse en course à pied afin de terminer dans les premiers. Dans le triathlon nature par contre, c’est le triathlète le plus équilibré dans les trois disciplines qui l’emportera. Il y a aussi plus de technicité avec le VTT et le trail qui permettront aux athlètes plus puissants et techniques de faire la différence face aux autres taillés comme des antilopes et ayant à leur actif des 10 km en 30 minutes !

 

Vous attendiez-vous à cette troisième place dans la catégorie élite (30-34 ans) – et la quatrième au scratch – en 2h53.50 à l’issue de l’XTERRA Challenge (1 km de natation, 34 km de VTT, 10 km de trail) le 24 mai à Bois-Chéri ?

– Ne sachant pas qui serait de la partie, ni de quelle force seraient mes concurrents, je ne m’attendais pas à grand-chose. Lors de la remise des dossards, en récupérant le numéro 4, j’ai juste dit : «J’espère que cela déterminera le rang final.» Et ce fut le cas. Les trois premiers sont des habitués du circuit XTERRA, avec un ancien champion du monde, un autre qui figure dans le Top 5 et enfin le troisième qui a participé l’année dernière au XTERRA de Maui en se classant dans les 50 premiers. Donc de ce point de vue, je suis satisfait de ma première participation mais, bien évidemment, déçu de n’avoir pas été sur le podium scratch. La prochaine fois j’espère tirer un numéro de dossard plus proche de 1 !

 

Comment expliquez-vous cette attirance pour la nature et l’effort vert puisque vous prenez aussi plaisir à faire de grandes vadrouilles en trail ?

– Mon goût pour l’effort a commencé avec le trail. Depuis, me retrouver seul des heures durant en pleine nature me procure un plaisir incomparable. C’est l’occasion de se vider l’esprit et de vivre l’instant présent. Ces longues sorties en solitaire m’ont appris à mieux me connaître.

 

Votre montée en puissance, tant en trail qu’en triathlon, n’est pas le fruit du hasard. On sent chez vous le travail rigoureux et méthodique. Avez-vous toujours été amoureux de l’effort ou réfractaire à la dépense physique ?

– J’ai toujours été sportif mais les sports d’endurance ne m’intéressaient vraiment pas auparavant. Enfant, je pratiquais le karaté, l’équitation et le rugby. J’étais plutôt doué en athlétisme mais étant «partisan du moindre effort» concernant tout ce qui touchait au système scolaire et pratiquant cette discipline à l’école, ma carrière d’athlète est morte dans l’œuf. A mon plus grand regret aujourd’hui car mon rêve était de devenir décathlonien.

 

Ce n’est qu’à partir de 2008 que je me lance dans les sports d’endurance, avec le trail running et le kayak de mer. Depuis, je suis un amoureux de l’effort et j’ose enfin mettre les chances de mon côté afin d’atteindre les objectifs fixés.

 

Quand avez-vous compris qu’il était important de bien penser l’aspect préparation et entraînement ?

Lorsque l’on pratique un sport et que l’on passe du mode «loisir» au mode «compétition», c’est là que les choses se compliquent. On réalise très vite que ce n’est plus en s’entraînant au petit bonheur  que l’on progresse, bien que ce fût le cas avant. Alors on se pose des questions, et on pose des questions… Et on entend pour la première fois des termes «barbares» tels que vma, seuil, vo2max et j’en passe… Et hop ! nous voilà balancés dans un nouvel univers où, sans préparation et entraînement adapté, les objectifs ne seront pas atteints.

 

Le fait de gérer la librairie Le Trèfle, d’avoir un trésor de documentation sous la main, vous aide-t-il à ce niveau ?

– Tout à fait, j’ai accès à des tas de livres techniques que je commande à titre personnel afin de mieux comprendre le mécanisme de la préparation, de la nutrition et du mental du sportif. A la librairie, nous recevons aussi des magazines tels que Jogging, VTT, Vélo, Triathlète etc. qui sont une source non négligeable d’informations sur les programmes d’entraînement, les équipements et la nutrition.

 

Le goût de la lecture, de la recherche d’informations, vous a-t-il toujours habité ou fut-il un temps où vous avez été réfractaire à l’idée de prendre un livre et surtout le temps nécessaire pour s’y plonger ?

–    Ce n’est qu’à partir des études supérieures que j’ai commencé à apprécier la lecture. Avant cela, je rejetais tout ce qui m’était imposé par l’école, donc par conséquent la lecture. Aujourd’hui, je réalise l’importance de la lecture et son impact sur ma vie. C’est une source inépuisable de connaissances qui mènent bien souvent à la réflexion. Un livre peut changer une vie !

 

Gérer une librairie, la moderniser, faire en sorte qu’elle s’adapte à son époque, une époque où les gens prennent de moins en moins de plaisir à la lecture, relève presque du défi. Avez-vous toujours porté en vous cette dimension du défi ou s’est-elle imposée à vous un beau jour ?

–    En effet, à notre époque, avec la course folle des gens vers le gain et avec le trop plein de choses qui accaparent nos vies, il n’y a désormais plus de temps à perdre. S’asseoir dans un bon fauteuil, accompagné d’un bon livre, n’est malheureusement plus d’actualité pour beaucoup. Effectivement, gérer une librairie de nos jours est un défi. Ce n’est qu’en se lançant des défis que nous avançons, tous les jours nous sommes mis au défi, chaque choix est un défi. Je pense que cette dimension du défi est inscrite en nous mais qu’il nous faut parfois un déclic afin de s’en lancer un.

 

C’est ce goût du défi et ce besoin d’aventure qui vous font démissionner il y a six ans du poste de démarcheur pour les marchés étrangers à Floréal Knitwear et vous lancer dans un trip de 55 jours entre Sydney et Cairns ?

– C’est exact. Un jour je regardais la personne assise derrière le bureau d’en face, et je me suis dit : «Cela fait plus de quinze ans que cette personne travaille à ce poste. Quel cauchemar si je me retrouve là dans 15 ans !» J’étais de plus en plus dans les nuages et flottaient alors dans mon esprit des rêves de voyages et de découvertes. Je décidais alors sur un coup de tête de démissionner pour me lancer dans une aventure dont je rêvais : découvrir une partie de l’Australie à vélo en solitaire. Et ce fut une expérience incroyable.

 

Vous parvenez alors à recueillir Rs 15 000 pour l’association Etoile d’Espérance. L’effort prend-il un autre sens quand il se met au service des autres ?

– Exactement, il y a dans ce cas une toute autre dimension qui s’ajoute à celle du simple challenge personnel. Le fait d’œuvrer pour la bonne cause donne un sens à ce que l’on fait et cela permet, malgré les moments difficiles, de poursuivre l’objectif fixé.

 

Votre activité professionnelle vous procure le bonheur que vous recherchiez à ce niveau au point où vous ne rêvez plus d’ailleurs. Le sport reste toutefois votre mode d’évasion préféré. Il participe, au même titre que la lecture, de la découverte du monde et d’un enrichissement qui ne peut avoir lieu qu’au contact des autres…

– Le sport et la lecture sont en effet un mode d’évasion mais restent un mode d’évasion, alors que le rêve c’est «atteindre l’inaccessible étoile» comme le dit si bien Jacques Brel.

Les Championnats du monde de triathlon nature XTERRA seront le 26 octobre prochain le rendez-vous de l’effort et de l’exotisme, de la légende aussi, celle d’Hawai'iloa et du demi-dieu Maui…

– C’est joliment dit, mais faute de moyens et de temps, après les Jeux du Commonwealth, j’ai décidé de ne pas y participer. Mais je n’arrêterai jamais de rêver.

 

Portrait

 

Boris de Chazal est manager de la librairie Le Trèfle depuis peu, après avoir passé trois ans à divers postes au sein de celle-ci afin d’apprendre «les rouages du métier du livre». Il vient tout juste d’avoir 30 ans. Il voit là «quelque chose de troublant», convaincu d’être parvenu à «un des moments de sa vie où l’on fait le point sur le chemin parcouru» et «réalise aussi, heureusement, qu’il reste du chemin à parcourir».

 

En parallèle, il pratique le sport de façon assez intensive. Le triathlon accapare désormais tout son temps libre mais c’est «pour mon plus grand bonheur», confie-t-il. Mais moins cependant pour sa famille qu’il considère comme étant «un des piliers de ma vie». «Je ne le leur montre peut-être pas assez, mais sans elle, rien ne tiendrait », affirme-t-il.

Célibataire, «la faute peut-être au peu de temps» qu’il «accorde au côté social de ma vie», Boris de Chazal a choisi de ne pas se mettre de pression. Champion de Maurice de duathlon et de triathlon, deuxième au triathlon longue distance de Saint-Leu et auteur de quelques podiums en trail à Maurice, il court après des victoires et l’on sent qu’il aimerait aussi conquérir la première place sur le podium du coeur.